Credit Suisse ne devait pas tomber!
ÉDITORIAL. La stricte réglementation née de la grande crise financière prévoyait des plans pour démanteler les établissements trop grands pour faire faillite. Il est surprenant, voire désolant, qu’ils n’aient pas été appliqués

Décerner des bons et des mauvais points, à coups de «on aurait dû», «il aurait fallu» peut paraître terriblement perfide, après l’achat de Credit Suisse par UBS arraché ce week-end au forceps. L’effondrement de la deuxième banque du pays a été si fulgurant que le Conseil fédéral, la BNS et la Finma, l’autorité de surveillance des marchés financiers, n’ont pu que prendre acte vendredi soir de l’état de mort clinique de la banque des «entrepreneurs». Un établissement qui a accompagné le développement de la Suisse moderne, entretenant le mythe d’une nation privilégiée, vouée à la réussite et à la prospérité.
Il faut tout de même s’arrêter un instant pour prendre la mesure de la catastrophe survenue ces derniers jours. Credit Suisse n’était pas seulement étiquetée «trop grande pour faire faillite»; la banque fondée en 1856 par Alfred Escher ne pouvait, ne devait pas tomber. Non pas parce que sur des bonnets de ski, des terrains de foot ou des publicités affichant le large sourire de Roger Federer, elle était une compagne de nos vies, mais parce que les fonctions vitales de la banque étaient saines il y a quelques jours encore. L’établissement était solvable, il respectait les critères très stricts établis dans le sillage de la grande crise financière mondiale de 2008.
Notre suivi en continu: Credit Suisse est racheté par UBS au terme d’un accord historique
Alternative il y avait
C’était compter sans la confiance, véritable dictatrice des marchés financiers. Une faillite de l’autre côté de la planète et des propos maladroits d’un nouvel actionnaire ont suffi à semer un doute mortifère dans l’esprit des investisseurs, précipitant la fin du numéro deux bancaire suisse, en tout cas sous sa forme actuelle.
Une fin inéluctable? Si la reprise de Credit Suisse par sa rivale semblait ce week-end la seule solution à même d’éviter un effondrement du système financier suisse et international, on se dit qu’il y a tout de même eu de sacrées occasions manquées. La principale: celle de l’extraction de l’entité suisse, mère nourricière du groupe en péril, que des actionnaires aussi minoritaires que minorisés demandaient depuis longtemps, intensifiant leurs appels en automne dernier encore.
Ce scénario était pourtant prévu dans les plans de sauvetage des établissements too big to fail. Il est incompréhensible que l’attentisme dont ont fait preuve les autorités l’ait rendu caduc.
Non, décidément, Credit Suisse ne devait pas tomber! Au soir d’une journée aussi historique que désastreuse pour la place financière helvétique, on ne peut s’empêcher de penser que ces derniers mois, la BNS, la Finma et le Conseil fédéral ont fait preuve d’un triste excès de… confiance.
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