Toute la journée, les Américains ont hésité sur le diagnostic. Quelle origine donner au massacre qui a eu lieu jeudi à Fort Hood, la plus grande base militaire du pays? Une maladie interne ou l’attaque d’un corps étranger? Aucune des deux explications n’est entièrement valable. Mais de plus aucune n’est rassurante.

Lors de la guerre du Vietnam, les soldats qui retournaient leur fusil contre leurs camarades étaient légion. Mais l’armée US n’est plus la même. Face aux traumatismes à répétition causés par les guerres, elle a mis en place un réseau imposant d’assistants, de psychologues et de structures d’aide chargés d’épauler les soldats. Le fait que ce soit précisément l’un de ces psychologues qui ait déchargé ses armes sur ses compagnons ne montre pas seulement que tout le système a trouvé ses limites. C’est la preuve de son pourrissement.

L’autre hypothèse n’est pas plus agréable. Voilà un officier américain d’origine palestinienne qui semble avoir choisi de commettre, en plein Texas, un attentat­suicide comparable à ceux qui ont lieu dans les rues de Bagdad ou de Kaboul. L’ennemi n’a pas baissé les bras. Pire, il peut frapper de l’intérieur.

En réalité, la tuerie de Fort Hood semble être une étrange, et unique, combinaison de ces deux maux. Et, de ce fait, elle est comme une double leçon pour Barack Obama et pour une administration qui semble aujour­d’hui un peu suspendue, après avoir pris les commandes du pouvoir il y a bientôt un an.

Tant qu’elles ne seront pas achevées pour de bon, c’est-à-dire tant qu’elles n’auront pas débouché sur une solution durable, les guerres en Irak et en Afghanistan continueront de peser sur le moral de l’Amérique, de la même manière qu’elles continueront d’accroître par contagion le nombre de ses ennemis, fussent-ils de simples individus désemparés.

C’est supposément pour mettre fin à la menace terroriste que les Etats-Unis sont intervenus en Afghanistan et qu’ils ont dévasté l’Irak. C’est au nom de cette même priorité de sécurité qu’ils doivent travailler aujourd’hui sans relâche: afin d’atténuer les effets néfastes que ces combats ont déjà provoqués, et pour éviter d’en ajouter vainement de supplémentaires .

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