Mark Zuckerberg n’assume rien. Et c’est normal. Etre «l’arbitre de la vérité», selon sa propre expression, très peu pour lui. On l’avait oublié, mais Facebook, Twitter ou YouTube ne se voient pas vraiment comme des œuvres d’utilité publique. Ce sont de gigantesques machines à gagner de l’argent, alimentées par des publicités qui se nourrissent de milliards de clics. Mais vu leur taille – Facebook, c’est aujourd’hui 2,7 milliards d’utilisateurs – qui les rend incontournables, nous les assimilons à des services publics. Or ces plateformes ne servent qu’une chose: leurs propres desseins.
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Dans cette incroyable tension entre intérêts privés et publics, le recours de Facebook à sa propre «cour suprême» externe ne réglera sans doute rien. Si elle décide de valider le bannissement de Donald Trump, elle risque de créer un dangereux précédent, ouvrant la porte à une censure beaucoup plus large. Si cette cour laisse l’ex-président s’exprimer de nouveau, elle rendra la vie impossible à Facebook, qui devra tenter de modérer en permanence ses propos.
L’affaire dépasse bien sûr de loin les petites personnes de Donald Trump et de Mark Zuckerberg. Ce sont les réseaux sociaux qui sont ici en cause et personne ne sait comment les maîtriser. L’autorégulation? Elle a fait les preuves de son inefficacité. Des lois strictes? Si elles devaient être votées, elles risqueraient, à cause d’un cadre trop dur, de museler des voix dissidentes légitimes. Personne n’a de solution.
Il faut évidemment tenter de nouvelles approches, combiner plusieurs pistes. Mais ce match face aux réseaux sociaux est désespérant. Car c’est leur modèle d’affaires, se basant sur les discours haineux, outranciers et flirtant avec les limites de la vérité, qui est en cause. Encadrer ces plateformes semble, aujourd’hui, mission impossible.