Le covid, la guerre en Ukraine et l’explosion des prix des vivres, du pétrole et du gaz ont mis l’économie mondiale à terre. Les pays à bas et moyens revenus ont été plus frappés que d’autres. Des pans entiers de leur population sont tombés dans la pauvreté. Mais à l’instar du Ghana qui s’est déclaré en faillite, de nombreux pays africains souffrent d’une vulnérabilité chronique. Pour s’émanciper et se protéger des chocs exogènes, ils doivent revoir leur modèle de développement.

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Le Ghana offre un bon exemple de ce qui est faisable ou non. Avec la Côte d’Ivoire, il fournit 60% du cacao à l’industrie chocolatière mondiale. Celle-ci brasse 130 milliards de dollars par année. Mais la part qui revient aux pays cacaoyers ne dépasse pas les 6%. La plus belle, c’est-à-dire la valeur ajoutée industrielle, va aux chocolatiers américains, suisses, belges et aux intermédiaires.

La voie de l’industrialisation

Sans une révolution dans la chaîne d’approvisionnement, les pays producteurs des fèves seront toujours perdants, covid ou non, guerre en Ukraine ou non. Il est certes difficile de modifier les voies établies depuis des décennies, et les intérêts des uns et des autres sont bien sauvegardés. Mais l’initiative du Ghana et de la Côte d’Ivoire de former une coalition et d’imposer une prime de 400 dollars en sus du prix du marché va dans le bon sens. Nestlé, Barry Callebaut, Mars ou Cadbury tentent de contourner cette exigence. C’est de bonne guerre.

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Le Ghana comme les producteurs d’autres matières premières en Afrique doivent persévérer dans la voie de l’industrialisation et offrir du chocolat au lieu du cacao sur le marché mondial. Tant en Europe qu’aux Etats-Unis, les droits de douane sur les produits finis sont progressifs et punitifs. Mais là encore, ces derniers doivent faire front commun pour changer les lois discriminatoires. Cette bataille se joue au sein de l’Organisation mondiale du commerce et les pays africains doivent y faire entendre leur voix.

Sans cette révolution économique, le statu quo l’emportera. Ne pouvant faire face aux chocs extérieurs, comme l’appréciation du dollar ou le resserrement monétaire en Europe et aux Etats-Unis, ces derniers n’auront d’autre choix que de frapper à la porte du Fonds monétaire international (FMI). Qui peut s’en passer aujourd’hui? Celui-ci viendra éteindre l’incendie, mais imposera ses conditions, soit des programmes d’austérité. Pourtant, ce sont des investissements massifs dont les Etats en difficulté ont besoin.


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