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Festivals: après l’euphorie de la reprise, la réalité du marché

ÉDITORIAL. Les grands festivals de l’été, confrontés à une concurrence mondiale, doivent faire face à une nouvelle hausse des cachets demandés par les artistes, qui jouent un jeu dangereux

Matthieu Chedid, alias M, en concert au Paléo Festival, le 19 juillet 2022. — © Laurent Gilliéron / Keystone
Matthieu Chedid, alias M, en concert au Paléo Festival, le 19 juillet 2022. — © Laurent Gilliéron / Keystone

Qu’elle semble déjà loin cette parenthèse pandémique durant laquelle les artistes s’invitaient dans notre salon, où l’on pouvait allumer son ordinateur et assister en direct à des mini-concerts des Rolling Stones ou d’Henri Dès. Pendant quelques semaines, on avait trouvé formidable de se sentir virtuellement connectés… Avant de se résoudre à admettre que rien ne remplacerait jamais l’émotion de la musique live. C’est ainsi que, dans l’euphorie du retour à la normale, l’été 2022 apparut comme un eldorado, avec des festivals dont la résurrection s’est transformée en triomphe public.

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Mais voici qu’en fin d’année dernière, à peine remis de cette saison bénie, certains professionnels s’inquiétaient de la hausse massive des cachets demandés par les artistes qui, depuis l’effondrement du marché du disque, s’avère exponentielle. Les concerts représentant désormais jusqu’à trois quarts de leurs revenus, les plus cotés n’hésitent pas à jouer la concurrence pour faire monter les enchères.

La loi de l’offre et de la demande

A travers le monde, on en dénombre de plus en plus de ces festivals, dont certains mettent en vente, pour chaque soirée, plus du double de billets qu’un Paléo. Et beaucoup de ces manifestations appartiennent désormais à quelques multinationales cotées en bourse. L’industrie de la musique live n’échappe pas à la loi de l’offre et de la demande: plus les possibilités de se produire sur scène sont nombreuses, plus les artistes peuvent exiger des cachets élevés, même si le phénomène ne concerne que les grosses têtes d’affiche.

Un éditorial de 2018: Les festivals suisses, un îlot de résistance

A l’échelle internationale, les manifestations suisses restent modestes. A elles, dès lors, de ne pas entrer dans cette surenchère et de continuer à privilégier l’accueil du public et la qualité d’écoute, à l’image des petits rendez-vous régionaux qui, depuis quelques années, ont le vent en poupe. Car, in fine, si trop de festivals acceptent de signer de gros chèques puis de répercuter ces coûts sur le prix des billets, le public risque de ne plus suivre. D’autant plus à l’heure où se multiplient les grandes tournées qui font halte dans les stades, avec des places proposées à des tarifs parfois prohibitifs.

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Les artistes, leurs agents et les festivals ont tout intérêt à tirer à la même corde. Si après cette reprise plusieurs manifestations venaient à disparaître, ce qui pourrait être le cas en 2024, cela serait préjudiciable pour tous les trois. Et pour le public.


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