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Fiscalité: que chacun paie son dû

Editorial. L'évasion et la fraude fiscales sont encore courantes. Les Etats en sont conscients et ont entrepris une réforme de la fiscalité internationale. Il est désormais temps de la mettre en œuvre

Le siège de l'Organisation de coopération et de développement économiques à Paris. Celle-ci a été chargée en 1993 par le G20 de mener des travaux en vue de la réforme fiscale internationale.  — © Francois Mori / AP Photo via Keystone
Le siège de l'Organisation de coopération et de développement économiques à Paris. Celle-ci a été chargée en 1993 par le G20 de mener des travaux en vue de la réforme fiscale internationale. — © Francois Mori / AP Photo via Keystone

Le départ d’un haut fonctionnaire de l’OCDE n’est pas un événement en soi. Mais celui de Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d’administration fiscales depuis février 2012, ne laisse pas indifférent. Le Français a été intimement lié à la réforme de la fiscalité internationale, a fortiori à celle du système suisse. Dans l’interview qu’il a accordée au Temps deux semaines avant de quitter ses fonctions, il déplore le fait d’être considéré comme le «fossoyeur du secret bancaire suisse». En revanche, il se plaît à souligner qu’après ces pressions et la réforme qui s’est ensuivie, le système suisse est désormais plus crédible et présentable.

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Ce départ est aussi une occasion en or pour faire le bilan de cette réforme de la fiscalité internationale qui, auparavant, faisait peu ou pas de différence entre la fraude et l’évasion fiscales. Il avait fallu la crise financière de 2008 pour que les Etats comprennent que les caisses publiques étaient vides et que des particuliers et des entreprises contribuables parvenaient par des astuces comptables à échapper au fisc. Sans oublier les multinationales brassant des milliards et ne déclarant pas de bénéfices au fisc.

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Pascal Saint-Amans relève un fait qui, s’il n’est pas surprenant, est tout de même dérangeant. Alors que toute la planète s’est engagée à mettre en place le système d’échange automatique d’informations en ce qui concerne la fiscalité des particuliers, les Etats-Unis font exception et ne jouent pas le jeu. Or, en continuant à tolérer ce cas d’exception, l’OCDE risque à terme sa crédibilité.

S’agissant de la fiscalité des entreprises, les Etats ont fait un pas énorme en signant en octobre 2021 un accord dit «BEPS» (érosion de la base d’imposition et transfert des bénéfices) qui prévoit, d’une part, un taux d’imposition minimum de 15% sur les bénéfices, et, d’autre part, un partage équitable des impôts entre les pays où les bénéfices ont été réalisés.

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L’ensemble de ce processus a pris quinze ans. Il est maintenant question de le mettre en œuvre. Mais cela ne s’annonce pas sous les meilleurs auspices. Dès lors, il appartient aux Etats qui, comme la Suisse, ont pris les devants et ont sincèrement pris le train de la réforme, de faire pression sur les autres pour ne pas laisser passer cette chance d’harmonisation. Comme le dit Pascal Saint-Amans, il n’est pas seulement question d’argent, mais de justice fiscale. Autrement dit: chacun a le devoir de payer son dû.