Les Français imposent une proportionnelle. La classe politique sera-t-elle à la hauteur?
ÉDITORIAL. La culture politique française est complètement étrangère aux notions de consensus et de coalitions, rendues nécessaires dans un parlement aussi explosé que celui sorti des urnes ce dimanche

Cela fait des années que la famille Le Pen et les mélenchonistes réclament une élection de l’Assemblée nationale à la proportionnelle. Cela fait des années que les présidents de la République (dont Emmanuel Macron) la promettent aussi. Eh bien, d’une certaine manière, le peuple français l’a imposée, en tout cas à petite dose, dimanche 19 juin.
Le système majoritaire à deux tours français, qui favorise les partis centristes en aboutissant toujours sur une finale, ne désignait jamais un paysage de députés fidèle aux résultats du premier tour et donc à la diversité d’opinions dans la population. Le Front national pouvait obtenir 13% des voix au premier tour et 1% des députés au second. Les partis extrêmes ou minoritaires finissaient toujours par être largement sous-représentés.
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Depuis dimanche, ce n’est presque plus le cas. Si l’on se fie aux votes au premier tour de ces législatives, dans une élection à la proportionnelle pure, la coalition présidentielle Ensemble! devrait avoir 150 sièges, elle en aura 246. La Nupes de Jean-Luc Mélenchon aurait compté 150 députés elle aussi, étant arrivée au coude-à-coude avec les Macronistes au premier tour, elle en aura finalement 142. Le Rassemblement national, lui, en aurait eu 108, il en aura 89. Et Les Républicains qui en auraient obtenu 60 en ont récoltés finalement 61. On le voit, les chiffres ne correspondent pas exactement, la prime au président et au centre est toujours là, mais c’est un premier pas.
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Problème: on l’a bien vu dimanche soir dans les réactions des principaux concernés, la culture politique française est complètement étrangère aux notions de consensus et de coalitions larges pour qu’un parlement ainsi explosé puisse fonctionner. Mélenchonistes et Lepénistes se lançaient déjà dans l’invective. Christian Jacob, le patron des Républicains, repoussait toute main tendue pour participer à une majorité élargie. On est loin de la recherche de solutions.
Bien gouverner à la proportionnelle, comme en Allemagne ou en Suisse, nécessite une souplesse que la classe politique française va devoir acquérir au plus vite. A défaut, on se dirigera vers des guerres de tranchées qui paralyseront la France ou forceront Emmanuel Macron à présider par la force (on évoque déjà une dissolution dans un an et des lois passées par l’article 49.3 de la Constitution, sans débat au parlement). Un ultra-présidentialisme qui mettra de l’huile sur le feu d’une colère populaire qui n’en avait vraiment pas besoin.
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