Mercredi soir, la politique genevoise s’est donnée en spectacle. Dans la salle de l’Alhambra où 700 personnes sont venues voir ferrailler les 23 candidats au Conseil d'Etat, lors du grand débat de Léman bleu et du Temps, se pressaient des élus, des militants avec écharpe et t-shirt à l’effigie de leur parti, des groupes de pression plus ou moins bruyants. Avec mention spéciale décernée à l’extrême gauche qui, d’abord groupée, s’est ensuite dispersée dans les loges pour donner à ses applaudissements et huées un effet stéréo. Drôle et presque touchante, la démocratie suisse à l’œuvre sur un ton emphatique typiquement genevois.

Sur scène, on a vu défiler quelques têtes d’affiche, des vieilles gloires qui n’arrivent pas à raccrocher, des aspirants sans envergure et des espoirs, des indignés populistes et des figures populaires, des modestes et des clowns. Drôle, parfois gênant, comme la comédie humaine.

Genève confuse, polarisée, déclamatoire

Mais si ce débat préfigure la prochaine législature, alors on n’en ressort pas vraiment rassuré. Car Genève a joué là une allégorie de ce que fondamentalement elle est: confuse, polarisée, déclamatoire. Depuis quelques années, le canton s’illustre davantage dans les batailles stériles que dans des projets concrets, quels qu’en soient l’orientation politique ou le thème – mobilité, fiscalité, formation. L’exécutif peine à convaincre, le législatif peine à construire des majorités. Le débat est vif, mais les réalisations tardent. Aucune réforme majeure n’a abouti. Lorsqu’un projet passe la rampe, le camp adverse lance le référendum. Jamais, de mémoire de Genevois, on n’aura autant voté que ces dix dernières années. Sur tout et n’importe quoi, faisant du peuple l’arbitre d’une classe politique qui faillit à son mandat: s’accorder un minimum pour gouverner un peu.

Aussi, c’est peut-être bien en fonction de la stature des candidats, davantage que de leurs idées politiques, que de nombreux Genevois vont choisir. Faisant le pari que pour sortir de cette situation de blocage, les convictions personnelles n’y suffiront pas et qu’il faudra parier sur autre chose pour croire à une amélioration: l’étoffe. Si étoffe il y a, vision il y a. Et possiblement adhésion. Or, lors de ce show télévisé, les hommes et les femmes d’Etat n’étaient pas légion. Certains étaient carrément sous la ligne de flottaison. Il reste à espérer que certains sauront se révéler.