Joe Biden joue sa crédibilité climatique
ÉDITORIAL. En vue de la COP26, le président américain a avancé d’ambitieux objectifs de réduction des gaz à effet de serre, avec une enveloppe de 555 milliards de dollars que le Congrès n’a pas encore avalisée. Mais une rhétorique optimiste ne suffit plus

Joe Biden place la lutte contre le réchauffement climatique au cœur de son mandat, et c’est la tête haute qu’il souhaitait arriver à la COP26. L’Amérique est de retour! Sauf que les tractations frénétiques autour de ses ambitieux plans d’investissements et réformes sociales qui s’éternisent au Congrès en ont décidé autrement. Le message risque d’être du coup brouillé. Le président démocrate, malgré des concessions de dernière minute, a pris son avion pour l’Europe sans vraiment savoir s’il allait perdre la face ou pas.
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Une enveloppe de 555 milliards de dollars
Mais une chose est sûre: il reste déterminé à reprendre le leadership de la défense du climat et à créer une nouvelle dynamique mondiale. Difficile d’offrir davantage de contraste avec son prédécesseur Donald Trump. Des promesses, le démocrate est passé aux actes. A peine élu, il a réintégré l’Accord de Paris dénoncé par Trump, nommé l’ex-secrétaire d’Etat John Kerry envoyé spécial sur le climat, puis organisé, en avril, un sommet mondial. Enfin, ses grandes réformes sociales, qui attendent toujours le feu vert du Congrès, prévoient une enveloppe de 555 milliards de dollars pour le climat. Jamais dans l’histoire américaine un effort financier aussi important n’a été consenti!
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Joe Biden veut se démarquer. Et prôner des solutions audacieuses, capables de faire tache d’huile. Il prend soin de vanter la création d’emplois. Les Etats-Unis s’engagent désormais à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 50 à 52% d’ici à 2030 par rapport au niveau de 2005. Et visent la neutralité carbone d’ici à 2050. Mais à y regarder de plus près, Joe Biden a surtout présenté un joli paquet-cadeau, dont le contenu est déjà un peu cabossé. Adieu la suppression des allègements fiscaux en faveur des combustibles fossiles! Bye bye l’idée d’imposer une taxe sur les émissions nationales de méthane!
Joe Biden joue sa crédibilité climatique à un moment où sa présidence tangue, avec le spectre d’un retour de Donald Trump en 2024. S’il veut espérer mettre les Etats-Unis, deuxième plus gros pollueur mondial après la Chine, sur la bonne voie de façon durable, il doit agir sans plus attendre. Afficher ses bonnes intentions et une rhétorique optimiste ne suffit plus. Au Congrès, le lobby du pétrole et du gaz reste puissant. La semaine dernière, les patrons des deux plus grands groupes pétroliers américains, Chevron et ExxonMobil, tout en reconnaissant le besoin de lutter contre le dérèglement climatique, ont explicitement déclaré qu’ils refusaient de s’engager à réduire leur propre production.
Avant de donner des leçons aux autres grands pollueurs, Joe Biden doit d’abord prouver que, contrairement aux moqueries émises par la Chine, les Etats-Unis ne sont pas que «le mauvais élève qui revient sur les bancs de l’école après avoir séché les cours».
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