C’est un film d’action spectaculaire à défaut d’être inoubliable, Bullet Train, qui a ouvert mercredi le 75e Locarno Film Festival. Chaque soir jusqu’au 13 août, 8000 personnes pourront assister sur la majestueuse Piazza Grande à une projection en avant-première d’un film combinant la dimension à la fois auteuriste et populaire de la manifestation tessinoise, dont la première édition a eu lieu, à l’instar du Festival de Cannes, en 1946.

Au sortir de la guerre, les festivals de cinéma sont devenus des lieux de rencontres et de débats défendant la diversité et la liberté d’expression. Locarno, qui fait partie avec Cannes, Venise et Berlin des quatre grands rendez-vous européens, a accompagné les débuts du néoréalisme italien puis de la Nouvelle Vague française. Les films les plus en vue, dans ces vitrines où le glamour se mêle à la cinéphilie, connaissaient ensuite de belles carrières dans les salles. Mais ça, c’était le monde d’avant.

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Au secours des exploitants

Au printemps 2020, l’arrivée de la pandémie et le confinement mondial qui a suivi ont profité aux plateformes de streaming et de vidéo à la demande, qui ont vu leur nombre d’abonnés exploser. De manière agressive, Disney+ a carrément décidé de se passer, pour certains titres, d’une exploitation en salles. En Suisse, entre décembre 2019 et décembre 2021, la fréquentation a chuté de près de 50%. Et la reprise se fait toujours attendre. Hormis quelques blockbusters, peu de productions attirent les foules. Même des auteurs jadis adulés, comme Pedro Almodovar ou Woody Allen, ont sorti leur dernier film dans une indifférence quasi générale.

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Les événements, par contre, attirent un public ravi de «vivre une expérience», selon l’expression désormais consacrée. Les avant-premières avec invités, les projections suivies d’un débat et les festivals, dont la programmation passe par un travail de curation, sont très suivis. Le cinéma n’est donc pas près de mourir, et il est même, grâce au travail des plateformes, en dehors de toute considération qualitative, extrêmement vivant. C’est par contre son mode de diffusion et de consommation qui est en train d’irrémédiablement basculer.

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«Qui va payer l’addition?» se demandait durant la pandémie un collectif de cafetiers-restaurateurs vaudois. En ce qui concerne l’industrie du cinéma, la réponse semble malheureusement connue: les exploitants. Au nom de la diversité, il est ainsi nécessaire que ceux qui défendent un autre cinéma que la production commerciale courante puissent être aidés.

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