L’arrestation lundi d’Ibrahim Yazdi ne révèle rien d’autre qu’un régime aux abois.
Ancien politicien iranien, il avait été le premier ministre des Affaires étrangères de l’ayatollah Khomeiny. Il avait contribué à instaurer les premiers tribunaux islamiques. Cet homme âgé, que Le Temps a rencontré il y a peu dans sa demeure de Téhéran et qui est porteur des valeurs morales de la République islamique, n’a plus de poids sur la scène politique iranienne. Mais le régime se méfie désormais comme de la peste de toute figure qui incarne l’opposition, davantage même que des Etats-Unis ou d’Israël.
Deux questions se posent au lendemain de la répression sanglante menée par les Gardiens de la révolution et les bassidjis lors de la très symbolique fête sainte de l’Achoura: jusqu’où ira l’opposition et quelle est la résistance du régime à ces coups de boutoir? Depuis la réélection contestée d’Ahmadinejad, le pouvoir s’est enfermé dans une voie sans issue. S’il met fin à sa politique inflexible, il donne de l’air à l’opposition. S’il applique la méthode du tout répressif, il risque de radicaliser des opposants convaincus que le temps est venu de porter l’estocade.
Incapable de proposer des pistes pour sortir de la crise qui fait rage depuis le 12 juin, sans programme politique, la république des mollahs paraît plus disposée à écraser la Révolution verte qu’à dialoguer. Quitte à exposer sa fragilité par la force de la matraque. Cela pourrait ne pas suffire à arrêter des jeunes manifestants de Téhéran, Tabriz ou Shiraz habités par un profond désir de liberté.
La survie du pouvoir iranien dépend paradoxalement des éléments constitutifs du régime. Divers témoignages laissent entendre que plusieurs policiers auraient renoncé à réprimer les manifestants. Au sein des forces armées, des rumeurs courent que tous n’approuveraient pas la méthode dure des Gardiens de la révolution. Or l’armée reste un facteur fondamental de la stabilité d’un pouvoir. Les défections au sein des forces armées iraniennes contribuèrent au renversement du shah en 1979.