De la énième conférence de presse de Hans-Rudolf Merz consacrée au secret bancaire se dégage un sentiment étrange. Un sentiment mêlant perplexité, malaise et malice. Un sentiment qui prend une tonalité différente selon que l’on analyse les annonces faites mercredi sous l’angle de la politique extérieure ou de la politique intérieure.
Face à l’extérieur, le Conseil fédéral rêve de donner l’impression qu’il gonfle les muscles, qu’il a des armes pour se faire entendre sur cette scène internationale qui le bouscule. On en reste cependant à la multiplication d’actions qui se juxtaposent sans pour autant donner l’image d’une stratégie globale. Et ces actions en restent pour l’heure au stade déclamatoire. Il faut que les actes suivent, que le gouvernement montre qu’il sait faire valoir ses arguments dans des enceintes telles que l’OCDE, le FMI ou le Conseil de stabilité financière, où il aura dorénavant deux représentants.
Sur ce terrain-là, la Suisse, acculée dans ses derniers retranchements, a tout à prouver. Et elle a encore beaucoup à perdre, car son siège au conseil exécutif du FMI n’est pas garanti à vie. Ces doutes, cette absence de stratégie globale donnent ce sentiment de perplexité et de malaise.
Or, la défense de ces intérêts-là est plus cruciale que la conclusion de douze accords de double imposition conformes aux critères de l’OCDE. A priori, la Suisse paraît en mesure d’atteindre cet objectif. Certains jalons sont déjà posés, puisque quatorze pays ont manifesté leur intérêt.
Les pourparlers les plus avancés, avec le Japon et la Pologne, tombent d’ailleurs à pic du point de vue de la politique intérieure. Il sera en effet difficile pour l’UDC de mobiliser la population contre un accord fiscal avec l’un de ces pays. Le Conseil fédéral, et c’est de là que vient le sentiment de malice, a sans doute senti son intérêt à faire aboutir les négociations avec ces deux Etats avant les autres. C’est tactiquement habile, mais il doit se préparer à répondre aux accusations de manœuvre que ne manquera pas de porter l’UDC.
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