Pour Steve Bannon, l’ex-stratège de Donald Trump, l’Italie est le centre de gravité d’un mouvement national-populiste d’envergure mondiale. Et Matteo Salvini, ministre de l’Intérieur et homme fort du gouvernement de coalition, en est la parfaite incarnation. Personne ne semble en mesure d’interrompre son ascension et celle de son parti, la Lega, qui avoisine les 40% d’intentions de vote. Un paradoxe au vu du très maigre bilan de son gouvernement. La charge fiscale des Italiens a augmenté. La croissance de l’économie devrait se limiter à 0,1% pour 2019, la plus faible performance parmi les pays européens.

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Le ministre de l’Intérieur bénéficie pourtant de plusieurs facteurs concomitants: membre du gouvernement, le Mouvement 5 étoiles, anti-système, est en train de s’effondrer à peine un an après sa percée historique aux législatives. Il paie le prix de ses incompétences. L’opposition italienne est en lambeaux. Forza Italia de Berlusconi est en voie d’extinction. Le Parti démocrate (PD) reste confiné aux classes moyennes supérieures et aux retraités. En Emilie-Romagne, région historiquement à gauche, il pourrait subir cet automne une défaite électorale mortifiante, menaçant son existence même. Il ne convainc plus les travailleurs encore déboussolés par l’austérité imposée après la crise de 2008.

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Matteo Salvini a compris que, dans ces circonstances, il vaut la peine de jouer la carte «seul contre tous». Il choisira le moment de rompre avec le Mouvement 5 étoiles, avec lequel la Lega n’a plus grand-chose à partager. Dans un système pourtant proportionnel, certains n’excluent pas que la Ligue obtienne une majorité absolue par le biais d’une mécanique électorale complexe, ou s’allie au parti d’extrême droite Fratelli d’Italia pour former un gouvernement davantage en phase avec ses idées.

Un tel cas de figure inquiète Bruxelles, qui ne peut pourtant plus se voiler la face: en Italie, l’immigration va continuer à dominer la scène politique. L’adoption lundi par le parlement du décret anti-immigrants est là pour le rappeler. La future présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, l’a compris. Elle était récemment à Rome pour présenter un nouveau pacte sur l’immigration et une réforme du système dit de Dublin, dont l’échec a fortement contribué à la montée des populistes en Italie.