Valérie Dittli aime les bords du Léman et les Guggen de Zoug. Mais, de toute évidence, son cœur penchait nettement en faveur des seconds, lorsque la future conseillère d’Etat, alors assistante doctorante à l’Université de Lausanne, a opéré son aller-retour fiscal Zoug – chef-lieu vaudois, entre deux élections.

Le hic, c’est que la jeune femme présidait alors la section vaudoise du Centre, tout en étant imposée fiscalement en Suisse alémanique. Voilà qui est fâcheux. Car le canton est désormais dirigé par une ministre des Finances qui n’a pas encore été taxée en six ans. Il va être difficile de se présenter la tête haute devant les syndicats de la fonction publique, le 22 mars, qui réclament l’indexation des salaires. Mais il y a presque pire dans cette histoire. Qu’elle ait eu, ou non, la volonté de payer moins d’impôts – ce qu’elle dément avec énergie mais qui reste raisonnablement plausible – est de moindre importance en regard de ce que la symbolique de son geste révèle: la légèreté avec laquelle elle a compris son engagement politique.

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Le canton comme un terrain d'expérimentation

Valérie Dittli croit se disculper avec force billevesées qui donnent le sentiment qu’elle considérait le canton comme un terrain d’expérimentation politique tout au plus. Sa ligne de défense pour échapper à l’accusation de tourisme fiscal est assez stupéfiante: elle a expliqué avoir hésité sur la voie professionnelle à suivre, elle admet que son «centre de vie» se situait de l’autre côté de la Sarine, qu’elle jouait dans une fanfare, qu’elle aidait son père à la ferme et qu’elle trouvait davantage de livres à Zurich.

Les Vaudois ont de quoi se sentir trahis et même un peu méprisés. D’abord, parce que leur ministre dit en substance que tout la rattachait à la Suisse alémanique, à moins d’une éventuelle élection. Comme si son attachement dépendait de l’occupation du fauteuil. Si ce n’était pas un problème de porte-monnaie, ce qu’elle s’évertue à démontrer, c’était donc un problème de cœur. Et le cœur, en politique, vaut autant que la raison.

Une errance de jeunesse?

Ensuite, ces manœuvres donnent le sentiment que la benjamine de la puissante famille Dittli a été dépêchée par le parti suisse pour reconquérir les terres vaudoises, sans grands états d’âme et faute de mettre la main sur un autre fief. Et si tout cela devait s’avérer une fausse lecture des choses, resterait le côté franchement opportuniste et calculateur qu’il revient à ses électeurs de juger. S’ils font preuve de compréhension et passent l’éponge sur une errance de jeunesse, pas sûr que la gauche, elle, fasse de même. Et on la comprend.

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