Porrentruy: le procès du vote par correspondance
Editorial
L’élection du chrétien-social Thomas Schaffter à la mairie de Porrentruy, en novembre 2012, est annulée. Le scrutin devra être répété, ordonne la justice, qui a mis en lumière «des irrégularités graves et massives»
L’élection du chrétien-social Thomas Schaffter à la mairie de Porrentruy, en novembre 2012, est annulée. Le scrutin devra être répété, ordonne la justice, qui a mis en lumière «des irrégularités graves et massives».
Deux individus, sans lien connu avec les partis, se sont auto-accusés – avant de se rétracter – d’avoir capté des suffrages, selon la terminologie juridique. Dans leur langage, ils ont «amené», certainement sans avoir conscience de commettre un délit, près de 300 enveloppes électorales, dans une ville où un peu plus de 3000 électeurs s’étaient exprimés. Ils sont poursuivis pour avoir recueilli et posté les bulletins de vote que des électeurs ont accepté de leur remettre, contenant le nom de leur candidat favori. Cette pratique, massive, est illégale.
L’affaire fait grand bruit, car elle se double de règlements de comptes locaux et prive de maire depuis six mois la deuxième commune jurassienne. Pour s’extirper de la chienlit, Porrentruy n’a d’autre choix que de retourner voter pour se choisir un maire, dans des conditions excluant la suspicion.
L’affaire de la fraude électorale de Porrentruy est aussi le procès du vote par correspondance et, surtout, des libertés prises dans sa pratique. L’exercice du droit de vote est l’acte fondateur de la démocratie. Il ne saurait être entaché du moindre doute. Une campagne électorale et une élection doivent répondre à des règles précises et strictes. Il n’y a pas de place pour le flou, les «aides intéressées», et tout écart doit être réprimé. L’affaire de Porrentruy doit servir d’exemple et d’avertissement.
Le vote, à l’urne ou par correspondance, est un acte individuel. Il doit être sûr. Pourtant, il serait anachronique de supprimer le vote par correspondance, sous prétexte que d’aucuns ont pu en abuser. Reste que des mesures susceptibles de le sécuriser peuvent être prises, à commencer par la sensibilisation de l’électeur. S’il y a eu captation de suffrages, c’est parce que des électeurs ont accepté de «donner» leur matériel de vote.
La sécurité du vote par correspondance est constitutive de la confiance du citoyen dans le système. Toute mesure concourant à son renforcement est la bienvenue, a fortiori à la veille de la généralisation du vote électronique .
Le Temps publie des chroniques et des tribunes – ces dernières sont proposées à des personnalités ou sollicitées par elles. Qu’elles soient écrites par des membres de sa rédaction s’exprimant en leur nom propre ou par des personnes extérieures, ces opinions reflètent le point de vue de leurs autrices et auteurs. Elles ne représentent nullement la position du titre.