La jeunesse chinoise, surtout, peine à se relever. Particulièrement frappée par les mesures sanitaires, une partie de celle-ci s’est manifestée ces dernières années «en restant couchée» pour signifier son refus des injonctions du pouvoir et une compétition économique de plus en plus féroce. Le chômage des jeunes atteignait 21% en juin dernier avant que les autorités ne décident de censurer cette statistique. En début d’année, 7,7 millions de candidats se bousculaient pour l’attribution de 200 000 postes de fonctionnaires comme le relate le correspondant du Temps à Shanghai. La recherche de sécurité est à nouveau prisée dans un pays qui crée moins d’emplois pour une population mieux formée.
Le changement est saisissant. Il y a 30 ans, la jeunesse ne parlait que de «se jeter à la mer». La prise de risque, l’économie de marché, l’ouverture étaient valorisées, porteuses d’espoir en des lendemains meilleurs. Aujourd’hui, l’expression à la mode est «laisser pourrir les choses». L’incertitude s’installe, voire un sentiment de désillusion. La nouvelle génération sera-t-elle moins bien lotie que la précédente? Le déclin démographique entamé l’an dernier ajoute une forme d’angoisse: la Chine sera-t-elle vieille avant d’être riche? Et les économistes s’interrogent: leur pays dépassera-t-il un jour les Etats-Unis, comme promis par le parti?
Ces problèmes ne sont pas propres à la Chine. On pourrait même dire qu’ils attestent d’une forme de maturité, la Chine étant désormais frappée des mêmes maux que l’Occident. C’est oublier l’état embryonnaire de sa protection sociale et les contraintes de son régime politique. Le «rêve chinois», slogan inventé par Xi Jinping pour faire pendant au «rêve américain», était destiné à mobiliser une nation pour renouer avec la puissance. En 2023, la Chine ne fait plus autant rêver. Ni les industriels étrangers ni sa jeunesse.
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