Technologie
ÉDITORIAL. La pandémie a mis en lumière l’incroyable médiocrité de la Suisse dans la numérisation. Ce retard a des conséquences concrètes sur nos vies

Des fax pour communiquer les chiffres des nouvelles infections et des piles de papier pesées pour estimer le nombre de cas? Il y a un an, les révélations sur les méthodes archaïques au sein de l’administration fédérale, alors que la Suisse tentait de faire face à sa première vague de Covid-19, avaient provoqué la consternation.
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Or ce n’était ni une mauvaise blague ni une exception: quels que soient les domaines, la Suisse accuse un incroyable retard dans sa numérisation. La situation est très inquiétante, voire dramatique.
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La semaine passée, on apprenait ainsi que la plateforme Mesvaccins.ch, censée être la clé de voûte du carnet numérique de vaccination, souffrait de lacunes béantes de sécurité. Le mal est donc profond et notre enquête démontre l’étendue du problème. Dans le domaine sanitaire, évidemment, mais pas seulement: loi sur les données, dépendance aux solutions étrangères, quasi-absence du numérique à l’école… La liste est interminable et les problèmes que nous pointons ne sont sans doute que les premiers.
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Cette Suisse qui s’enorgueillit d’être championne du monde de l’innovation est en réalité timorée face à la numérisation, quand elle n’y est pas réfractaire. La faute à des politiciens qui s’en désintéressent et à une administration sans doute peu enthousiaste à l’idée de modifier ses pratiques. Et c’est nous tous qui en pâtissons.
Il ne s’agit pas ici de donner des leçons, ni de pousser pour une numérisation à marche forcée, mais de tirer la sonnette d’alarme. On a vu à quel point la technologie est cruciale dans la gestion de la pandémie. Et au-delà de cette situation de crise, disposer d’un système de santé plus efficace et plus réactif, améliorer notre interaction avec l’Etat, voter plus facilement ou protéger nos données sont autant d’exemples où la numérisation va améliorer notre quotidien, voire relever de la sécurité nationale. Car les faiblesses numériques sont désormais des faiblesses tout court. Il s’agit aussi d’assurer notre prospérité: la place économique suisse, pour être concurrentielle, doit revenir à la pointe de l’innovation, tout comme les travailleurs doivent pouvoir améliorer leurs compétences numériques dans un monde où elles deviennent capitales.
Le tableau dressé, que faire? La tentation de noyer le poisson en nommant une Madame ou un Monsieur Numérique au sein de la Confédération est grande. Avec le risque de créer des postes alibis et de ne rien résoudre du problème. Ce dont nous avons besoin, c’est d’une prise de conscience – c’est le but de notre enquête – et de changements fondamentaux, émanant de tous.
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