Les grandes infrastructures de recherche fondamentale, celles qui nécessitent de puissants outils pour vaincre les résistances de la Nature ou se confronter aux connaissances théoriques, seront-elles les prochaines victimes de la crise budgétaire des Etats?

L’inquiétude naît au CERN à Genève mais surtout à Cadarache, dans le sud de la France, où les physiciens ont lancé la construction d’un tout nouveau type de réacteur nucléaire. Les arbitrages s’annoncent difficiles également aux Etats-Unis, malgré les promesses du président Barack Obama, qui a juré de remettre la science en tête de liste des priorités du pays.

Les contraintes budgétaires sont lourdes mais elles n’expliquent pas tout. La «Big Science» connaît depuis quelques années une forme d’inflation comparable à celle qui a cours dans l’armement militaire: tout est toujours plus cher, plus compliqué, pour des résultats dont l’évaluation parle de moins en moins à des gouvernements sous la tension permanente de l’opinion publique. De nouveaux champs d’investigation en dehors de la physique et de l’astrophysique, notamment les sciences du vivant, l’environnement ou l’énergie, exigent en parallèle de gros efforts budgétaires pour des perspectives d’applications souvent plus immédiates, plus tangibles. La tentation est grande de vouloir ralentir le rythme des investissements dans les premières pour accélérer celui des nouveaux prétendants à la connaissance. Sans doute, des ajustements sont nécessaires et se justifient. Mais la raison commande de maintenir haut (et dans la durée) l’effort de recherche, en élargissant la coopération internationale aux grands pays émergents.

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