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Ueli Maurer, le conseiller fédéral presque normal

Le ministre UDC a annoncé sa démission ce vendredi après quatorze ans au gouvernement. Il a souvent joué avec les limites de la collégialité mais a tout de même respecté, contrairement à Christoph Blocher, les institutions

Ueli Maurer a aussi ri lors de l’annonce de sa démission ce vendredi. — © PETER KLAUNZER / keystone-sda.ch
Ueli Maurer a aussi ri lors de l’annonce de sa démission ce vendredi. — © PETER KLAUNZER / keystone-sda.ch

Ueli Maurer a d’ores et déjà réussi sa sortie. Il a su créer la surprise et rester fidèle à lui-même: avec quelques piques contre les médias, le monde politique, mais aussi avec respect envers les institutions.

Sacré destin pour le Zurichois. En quarante ans de carrière, il est devenu l’une des figures politiques les plus connues du pays. En Suisse alémanique, c’est une véritable star. Comme il l’a rappelé, avec une certaine fausse modestie, il ne pouvait pas se déplacer dans les rues de Berne sans faire au moins 20 selfies. Tout récemment, il s’était rendu à Sörenberg pour la fête donnée en l’honneur du nouveau roi de la lutte suisse, Joël Wicki. L’occasion de déguster une bière et une saucisse et de soigner son image d’homme proche du peuple et de la Suisse traditionnelle. Une image qu’il a travaillée et cultivée.

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Sous ses airs bonhommes, c’est un as de la communication politique. Pour lui et pour son parti. Sans Ueli Maurer, l’UDC ne serait jamais devenue la première force politique du pays. Christoph Blocher a bien sûr joué un rôle déterminant sur le plan idéologique, mais c’est bien lui qui a arpenté toute la Suisse pour porter la bonne nouvelle conservatrice. Malgré son français très fédéral, il a aussi été fort présent en Suisse romande pour créer de nouvelles sections.

Christoph Blocher et Ueli Maurer ont travaillé main dans la main pour imposer leur vision du monde, mais l’ancien comptable est toujours resté très indépendant du milliardaire d’Herrliberg. Il n’a jamais été sa marionnette. D’ailleurs, Ueli Maurer a réussi là où Christoph Blocher a lourdement échoué: revêtir le costume de conseiller fédéral. L’un n’est resté que quatre ans au gouvernement avant de se faire déboulonner, l’autre a occupé la fonction durant quatorze ans, sans jamais frémir pour sa réélection.

Certes, le citoyen d’Hinwil n’a pas totalement lissé sa personnalité, il a souvent joué avec la sacro-sainte collégialité. Lors de la crise sanitaire, le ministre des Finances a dépassé les limites, par exemple en portant un t-shirt des sonneurs de cloche anti-covid. C’était sa stratégie: d’un côté, donner des gages à l’électorat UDC, de l’autre, travailler au sein du collège en se distanciant parfois de son parti. Comme ministre des Finances, il a respecté les règles et la ligne du gouvernement, y compris sur le plan international. Au sein du Conseil fédéral, il a d’ailleurs formé un axe fort avec Karin Keller-Sutter et Alain Berset.

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A l’heure du bilan, son engagement et son respect des institutions sont soulignés. Toutefois, son bilan politique demeure assez maigre. Alors à la tête de l’Armée, il avait échoué, au terme d’une campagne catastrophique, à convaincre les Suisses d’acheter les Gripen. Et tout récemment, il a raté ses réformes fiscales, ni le droit de timbre ni l’impôt anticipé n’ont été supprimés.

A 71 ans, Ueli Maurer dit vouloir redevenir un «Ueli normal». Pas sûr qu’il en ait vraiment envie, cette bête politique n’arrivera pas à rester dans sa tanière.