Le 8 mars n’est enfin plus le seul jour de l’année où la société se pose la question des droits des femmes. Pour la première fois depuis bien longtemps, ce jour s’inscrit dans une continuité. Il prend sa place dans une longue série de discussions, de regards, de prises de parole, d’avancées, de combats, de débats, qui, depuis que l’affaire Weinstein a lancé le phénomène #MeToo, a remis la question des femmes au premier plan.

La Journée internationale des femmes n’est plus un passage obligé, une sorte d’anniversaire convenu, mais devient un élément d’une vague plus forte, plus profonde, qui a amené des pans entiers de la société – du moins en Occident – à se réapproprier les questions féministes.

Lire aussi: Pour l’égalité salariale, réinventer la mobilisation

Certains y verront peut-être un phénomène de mode. Hollywood dénonce le sexisme et tout le monde suit les stars dans leur combat contre les abus, comme on adopterait leurs coupes de cheveux. Le marketing ne s’y est pas trompé, qui enfourche à son tour la cause féministe à grand renfort de slogans et de t-shirts imprimés. Et il est de bon ton dans les entreprises de promettre l’égalité et de l’afficher tout en perpétuant en sourdine l’ordre ancien.

L’affaire Weinstein à elle seule n’aurait pas pu revivifier en profondeur un mouvement qui paraissait en perte de vitesse ces dernières années, au point que nombre de militantes historiques, constatant que leurs petites-filles refusaient de se dire féministes et jugeaient un peu vite que tout était acquis, se demandaient si leur combat n’allait pas sombrer.

Une nouvelle génération en a décidé autrement. Elles sont militantes, sociologues, écrivaines, blogueuses, illustratrices, journalistes, actrices, humoristes, militantes, bédéastes, cinéastes ou vidéastes. Elles sont vivantes, pugnaces, drôles, irrévérencieuses ou provocantes, comme l’étaient leurs aînées. Elles interpellent, avec humour et pédagogie, se battent avec véhémence ou joyeusement, empoignent vigoureusement d’anciens et de nouveaux tabous. Elles ne sont pas toujours femmes: beaucoup d’hommes partagent et propagent ces idées.

Lire également: Le plafond de verre est toujours solide en Suisse

Annie Ernaux disait, il y a quelques années, qu’elle sentait autour d’elle une sorte de «chaîne invisible, constituée aussi bien de femmes réelles que des femmes imaginaires venues de lectures, de films». Cette solidarité d’idées, d’inspirations semble aujourd’hui renforcée, plus seulement pour la romancière, mais pour toutes et tous. Reste à savoir si, dans les faits, les droits et l’égalité suivront. Si l’on parviendra à passer du discours et de l’écoute aux actes.