La clause de sauvegarde proposée par le Conseil fédéral a toutes les allures d’une clause de sauve-qui-peut.

A cause des délais tout d’abord. Même si le gouvernement refuse de l’admettre, nous avons perdu beaucoup trop de temps. Le parlement ne sera saisi qu’en mars d’un projet concret, après deux ans d’indétermination. Il n’a quelques mois pour rendre sa copie.

Or depuis un an au moins l’idée d’une clause de sauvegarde, avec ou sans le consentement de l’UE, est débattue. Et l’on sait depuis la visite de Simonetta Sommaruga à Bruxelles, en février, que l’UE ne négociera pas sur le principe de la libre circulation. Le gouvernement a joué la montre pour des raisons politiques, afin de ne pas donner d’arguments à l’UDC avant les élections fédérales. Ces petits calculs de politique politicienne n’auront servi à rien, au vu des résultats électoraux.

Lire également : Une clause de protection très controversée

Aujourd’hui, le Conseil fédéral veut croire qu’une «solution à l’amiable» avec Bruxelles est encore possible. Mais comme rien ne bouge, il sort l’arme de persuasion massive, la menace d’une clause de sauvegarde unilatérale, avec plafonds et contingents, contraire à l’accord sur la libre circulation. Histoire de montrer aux Européens que «nous aussi nous avons les moyens de décider seuls de notre destin». C’est un aveu de faiblesse et non une démonstration de force. Le gouvernement n’utilise cet argument que le dos au mur, pressé par le temps.

Tout le monde le sait. La Suisse ne peut pas risquer de compromettre ses accords avec l’UE ou de subir des mesures de rétorsion. Il faudra passer par une interprétation du fameux article 14.2 de l’accord sur la libre circulation qui autorise un comité mixte de décider de mesures dérogeant à la libre circulation en cas de situation grave. C’est dans la détermination des critères de déclenchement, dans l’étendue des mesures restrictives, que le bras de fer est engagé entre Berne et Bruxelles.

On voit mal qu’une solution à l’amiable avec l’UE satisfasse l’UDC. Même si celle-ci feint d’avoir bougé sur la clause d’exception. En réalité elle veut une norme selon ses propres critères, aux seules mains de la Suisse. Pour Bruxelles, il ne faut même pas y songer.

Nous nous acheminons donc vers un référendum au printemps 2017. Qui, dans le climat social actuel sera perdu. La concurrence de la main d’œuvre étrangère, l’inefficacité des mesures anti-dumping, conjuguées aux suppressions d’emplois à cause du franc fort, libèrent la parole des salariés. Et plus seulement dans les zones frontalières. Or on attend toujours les mesures du ministre de l’Economie pour favoriser la main d’œuvre indigène.

Mais, au milieu de cette crise de confiance, le petit monde politique suit le train-train institutionnel habituel.

Le Temps publie des chroniques et des tribunes – ces dernières sont proposées à des personnalités ou sollicitées par elles. Qu’elles soient écrites par des membres de sa rédaction s’exprimant en leur nom propre ou par des personnes extérieures, ces opinions reflètent le point de vue de leurs autrices et auteurs. Elles ne représentent nullement la position du titre.