Verdir le Conseil fédéral
Elections fédérales
ÉDITORIAL. Si les vainqueurs en sont absents, la formule magique – et mathématique – que nous utilisons pour composer le Conseil fédéral est ébranlée par le verdict des urnes

La vague est plus forte encore que prévu. La mobilisation en faveur du climat de ces derniers mois secoue le parlement fédéral et lui infuse une bonne dose d’écologie. Impressionnant ici, plus modéré là, le phénomène est incontestable. Les écologistes, de gauche comme de droite, s’imposent comme jamais dans des institutions réputées pour leur stabilité. Ils font chuter l’adversaire ou prennent la place de l’allié, conquérant des bastions dont ils n’osaient à peine rêver.
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Au Conseil des Etats, les Verts sont sur la bonne voie pour avoir cinq sièges au lieu d’un seul et, au Conseil national, ils s’arrogent la place de 4e parti suisse, frisant même la 3e place. Ce positionnement les met en droit d’être pris en compte dans la formule magique composant le Conseil fédéral, qui accorde deux sièges aux trois formations les plus importantes et un à la quatrième. Mais l’écologie politique, c’est également les Vert’libéraux, qui montent fortement aussi. Verts et Vert’libéraux totalisent ensemble 20% des suffrages, ce qui, selon ce calcul, ferait d’eux la 2e force politique du pays, derrière l’UDC.
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Faut-il un ou une écologiste au Conseil fédéral? La question mérite mûre réflexion tant elle remet en cause des équilibres familiers. Il y a certes quelque chose d’artificiel à totaliser les scores de deux partis qui divergent en de nombreux autres points de leur programme. On sent du reste que les premiers intéressés ne sont pas forcément enclins à revendiquer franchement demain cette accession. Moins sans doute par manque de papables que par crainte d’indisposer leurs partenaires, ou parce que leur ascension se ferait logiquement au détriment du PDC, un allié occasionnel dont la gauche ne souhaite pas se débarrasser.
Mais il reste incontestable que ce qui porte aujourd’hui tant les Verts que les Vert’libéraux, ce n’est pas la divergence qu’ils peuvent avoir sur la fiscalité ou la libre entreprise, mais bien l’attention qu’ils portent prioritairement à l’avenir de la planète. Et qu’on le veuille ou non, la formule magique – et mathématique – que nous connaissons est ébranlée par le verdict des urnes, si les vainqueurs en sont absents.
Le résultat de ce dimanche montre qu’il existe une demande pour une politique écologique forte, indépendamment des appartenances traditionnelles de gauche et de droite. La cause de l’environnement est la cause de tous. Pour autant, les clivages partisans ne vont pas disparaître. Ils animeront les délicats arbitrages entre l’environnement et l’économie, le cadre de vie et l’activité humaine, la liberté et la contrainte, qui domineront la prochaine législature. Le Conseil fédéral, lui, devra être verdi d’une manière ou d’une autre, demain ou après-demain. Pour respecter le vote des Suisses.
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