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Emmanuel Macron, la gifle et le choix du risque

Le président français savait, avant d'entamer son nouveau tour de France des territoires, qu'il risquait de se retrouver face à la colère de ses concitoyens. Ne pas renoncer, et donc ne pas s'isoler, est dans ce contexte un choix courageux

Image de BFMTV. — © BFMTV/ReutersT
Image de BFMTV. — © BFMTV/ReutersT

L'image dit le volontarisme d'Emmanuel Macron. En bras de chemise, laissant derrière lui gardes du corps et policiers, le président français s'avance pour saluer quelques-uns de ses concitoyens. L'ambiance est à priori détendue, loin de l'atmosphère électrique des lendemains de manifestations de «gilets jaunes». Et voilà qu'une gifle a, mardi après midi, transformé en chaudron politique cette rencontre de Tain L'Hermitage, une commune de la Drôme. Un vieux cri royaliste «Montjoie Saint Denis» a retenti. Un «A bas la Macronie» l'a complété. Fin de la séquence: la preuve de la colère qui prévaut en France est de nouveau faite. L'élection présidentielle de 2022 se jouera sur un volcan.

Une prise de risque

Il est une autre manière, toutefois, de juger cette «tentative de gifle», pour reprendre l'expression de l'Elysée. Car tout en confirmant le niveau de violence politique préoccupant dans lequel baigne aujourd'hui l'Hexagone, cette claque témoigne aussi des risques pris par Emmanuel Macron, à moins d'un an de la prochaine présidentielle. Ce jeune chef de l'Etat de 43 ans se sait rejeté par une partie de la population française. Il reconnait lui-même, au fil d'entretiens disséminés dans les médias, avoir attisé les peurs et contribué, par son comportement, à s'isoler de tout un pan de la société. Il sait enfin que la société, brutalisée par la pandémie et l'aggravation des inégalités, est travaillée de l'intérieur par les extrêmes, par le «dégagisme» et le «plus rien à faire, plus rien à foutre» thématisé par les politologues, terrain propice aux pires accidents électoraux.

Une stratégie électorale

Ce président-là, pourtant, a crânement décidé de repartir à l'assaut des territoires et du terrain, misant sur son inépuisable talent de débatteur pour faire la différence. Risqué? Oui. Audacieux? Sans doute. Calculé? Bien sûr. En refusant de céder à la tentation de l'isolement, Emmanuel Macron renoue en fait avec ce qu'il sait faire de mieux: convaincre, séduire et prendre de vitesse ses adversaires, lui qui a l'avantage de tenir les commandes de l'Etat, et les cordons de la bourse du «Quoi qu'il en coûte» pour sortir de la crise sanitaire.

Ne nous trompons pas. Cette stratégie est électorale. Il s'agit bien, à travers ce tour de France, d'entamer une campagne dans le but d'être, en mai 2022, reconduit à la tête du pays. Lui qui promet de «rien céder à la violence» peut d'ailleurs se féliciter d'avoir été hier soutenu, comme chef de l'Etat, à l'unanimité par la classe politique, Mélenchon et Le Pen inclus. Reste une réalité qui mérite examen: ce président-là n'a pas renoncé à s'exposer, voire à se mettre en danger pour aller rencontrer les Français. A ceux qui le traitent de «petit marquis» ou de «président des riches», Emmanuel Macron a montré qu'il reste à la portée du peuple. A portée de gifle.

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