ESG: un sigle pour encourager les grandes sociétés à la durabilité
Opinion
OPINION. Plutôt que de se borner à critiquer les entreprises sur leur manque engagement environnemental, il faudrait créer un label de qualité sur les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance

Economie, politique, société, culture, sport, sciences: les enjeux écologiques traversent toutes les strates de notre société. Comment passer de l’analyse à l’action? Quelle est la part de décisions individuelles et celles qui relèvent de choix politiques? Pourquoi la complexité du défi ne doit pas nous décourager?
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A un moment où le réchauffement climatique se manifeste par la fonte des glaciers et où des températures extrêmes deviennent la routine, on peut s’interroger sur ce qui est fait du côté de la finance pour le climat. Plus généralement pour améliorer les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) des entreprises.
Il reste beaucoup de chemin à parcourir. Tout d’abord qu’en est-il du cadre légal? Au stade actuel, dans la plupart des pays européens, informer les actionnaires et le public en général sur la politique de critères ESG menée est recommandé pour les grandes sociétés. En cas d’omission ou de mensonge, sauf pour l’Allemagne, la législation ne prévoit pas de punition. En théorie, la vérification qu’une entreprise respecte bien ces critères devrait être faite par un tiers indépendant. Peu d’entreprises proposent ce type de service d’évaluation. En pratique, la vérification est effectuée de manière incomplète, par exemple en contrôlant que les photos publiées dans les rapports soient authentiques et pas simplement issues d’une base de données publique. L’analyse de texte robotisée vérifie la cohérence du texte d’année en année. Est-ce que les objectifs ont changé? Ont-ils été atteints? Est-ce que les rapports contiennent des chiffres permettant de quantifier certains paramètres, ou s’agit-il surtout de belles paroles répétées à l’identique d’entreprise en entreprise? Comme exemple de mesure, on peut mentionner le montant d’émission de CO2 et le taux de rotation du personnel, qui indique un climat social tendu. Un certain nombre d’agences de notation proposent pour les entreprises cotées des scores permettant une hiérarchisation selon tel ou tel critère et avertissent en cas d’incident ESG. L’analyse des scores montre une grande hétérogénéité.
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Un certain nombre d’ONG critiquent les entreprises sur les dimensions ESG. D’autres, plus constructives, proposent l’attribution de labels de qualité comme le Conseil de soutien de la forêt (FSC). Un tel label n’a de sens que si du côté du consommateur, il y a prise de conscience de la signification d’une telle certification.
Investir dans des entreprises certifiées
Les études académiques concluent qu’en général, investir dans des entreprises mettant en avant les aspects ESG ne prétérite pas la performance. De par leur capital sous gestion, c’est surtout aux investisseurs institutionnels qu’incombe la responsabilité de veiller à ce que les entreprises inclues dans le portefeuille suivent les critères ESG. Et là, on est de retour à la case départ: qui va faire ces évaluations? La charte d’un investisseur peut exclure la possibilité d’investir dans certains secteurs. La difficulté est de savoir où placer le curseur. Eliminer la pornographie peut constituer un départ, d’autant plus que les entreprises cotées en bourse et exerçant cette activité sont peu nombreuses. Eliminer la partie fossile d’un portefeuille est beaucoup plus complexe. Commencer par les rares entreprises actives dans le fracking (la fracturation hydraulique) peut être un début. Mais, faut-il aussi exclure du portefeuille les entreprises produisant des pipelines? Quid de celles qui produisent les ingrédients nécessaires aux médicaments?
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C’est cette complexité qui fait que, pour le moment, les critères ESG constituent un thème dont les acteurs de la finance parlent mais dont ils n’ont pas encore trouvé la recette miracle de la mise en place.
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