La chronique
Le «Pénélopegate» bat son plein après les révélations du Canard Enchaîné, et Monsieur propre se retrouve irrémédiablement sali. S’il est coupable, ce n’est que justice, mais pourquoi les médias ne dénoncent-ils qu’à droite alors que les exemples abondent sur l’autre bord de l’échiquier politique, se demande notre chroniqueuse Marie-Hélène Miauton?

La France nous offre un bien curieux spectacle: renonciations, dénonciations, évictions, héros déchus sur fond de scandale… Une véritable saga, menée à un train d’enfer, dont on ne cesse d’attendre et de craindre les péripéties nouvelles.
Apparemment, François Fillon, candidat de la droite à la présidentielle, a versé des salaires à sa femme en tant qu’assistante parlementaire, ce qui est légal, sauf si elle n’en faisait rien, comme elle l’a elle-même admis à plusieurs reprises. Cela ressemble à un emploi fictif, à moins qu’elle n’ait pensé expérimenter ainsi le salaire universel cher à Benoît Hamon…
Institutions détournées à grande échelle
Si tout cela est vrai, c’est lamentable et démontre que, chez notre grand voisin, les institutions sont détournées à grande échelle, au vu et au su de tous. Chacun se tenant par la barbichette, seuls les médias peuvent dénoncer les faits. Malheureusement, ils ne le font qu’à géométrie variable.
Pour preuve, au moment de la candidature de Ségolène Royal à la présidence de la République, Le Canard Enchaîné avait lancé qu’elle profitait de son statut de mère non mariée à François Hollande, pour toucher des allocations pour famille monoparentale. Ils avaient quatre enfants, ce qui devait coûter bonbon à l’Etat. Qui, alors, avait creusé cette info, juste ou fausse, pour tenter de déstabiliser la candidate socialiste et, plus tard, son ex-compagnon briguant la magistrature suprême? Personne, évidemment!
Le coiffeur de François Hollande
Ensuite, il y a eu les incroyables salaires du coiffeur à plein-temps du «président normal»: 10’000 euros par mois, soit 300’000 euros entre 2012 et 2016! Que faisait-il de ses journées, ce figaro, après avoir rempli sa tâche matinale? Encore un emploi fictif… à temps partiel!
Avant Hollande, le président François Mitterrand avait royalement ponctionné dans les finances publiques pour entretenir sa fille Mazarine et la mère d’icelle, en sus de sa légitime. Pour rappel, c’était à peine huit gendarmes, dont un colonel, qui étaient affectés nuit et jour à la protection de la «petite demoiselle» comme on disait alors. L’appartement luxueux, sis au Quai Branly, où logeaient la mère et l’enfant appartenait à l’Etat, de même que le superbe château où elles passaient leurs vacances. Un véritable Mazarinegate qui a duré quatorze ans mais dont les médias n’ont jamais dénoncé la nature ni l’ampleur, alors que les sommes dépassaient largement celles qu’ont coûtées aux contribuables les salaires apparemment indus de Pénélope Fillon.
Pourquoi François Fillon seulement?
A voir la liste des malversations des présidents, ministres ou députés français, on s’étonne que le peuple ne soit pas dans la rue pour exiger que l’on réforme les institutions et que l’on contrôle les dépenses des élus. Sauf que les médias ferment trop souvent les yeux sur ces agissements qui concernent peu ou prou l’essentiel de la classe politique française. On ne peut leur reprocher de les avoir ouverts tout grand pour François Fillon, c’est leur travail. Mais pourquoi lui seulement?
En effet, dans le même temps qu’explosait le Pénélopegate, Le Figaro pointait les dépenses d’Emmanuel Macron, autre candidat à la présidentielle, qui aurait dépensé à lui seul 80% des frais de représentation annuels de son ministère à Bercy, en huit mois seulement. Ces 120’000 euros (mazette, ce n’est pas rien!) lui auraient servi à préparer le lancement de son mouvement «En marche» et sa future campagne présidentielle!
Quelque chose de pourri
Avez-vous lu qu’une menace de mise en examen planait sur lui? Que le parquet enquêtait sur cet éventuel détournement de fonds publics? Que cela nuisait à son avenir présidentiel? Non, car seul Fillon tient l’antenne, les ondes et les colonnes.
Il est donc probable qu’une fois sa candidature enterrée, tout reviendra à la normale. Si une nouvelle loi est promulguée interdisant que les parlementaires engagent leurs proches, ils s’arrangeront pour se les prêter les uns aux autres. Les apparences seront sauves, mais pas l’honneur. Il y a décidément quelque chose de pourri au royaume de France!
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