ÉDITORIAL. Le président du Conseil ne sort pas trop affaibli des élections régionales et du référendum sur la réforme du parlement. Mais il lui incombe désormais de rassembler un paysage politique éclaté pour présenter à Bruxelles un plan de relance crédible

La digue a tenu. Après l’Emilie-Romagne en janvier, le second grand bastion de la gauche italienne, la Toscane, a lui aussi résisté aux assauts de la Ligue, parti europhobe soutenu par une large coalition de droite et d’extrême droite. Lors d’élections régionales partielles, une victoire de la formation du tribun Matteo Salvini lundi aurait fortement ébranlé une gauche déjà extraordinairement divisée.
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Le Mouvement 5 étoiles est dans une situation schizophrénique, insistant sur son statut de parti antisystème tout en jouant son rôle dans la coalition gouvernementale de Giuseppe Conte. La nouvelle formation créée par l’ex-premier ministre Matteo Renzi semble vouée à l’insignifiance. Le plus traditionnel Parti démocrate, également gouvernemental, est le seul à maintenir l’édifice de la gauche.
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Sur le plan national, les Italiens, assommés ce printemps par la pandémie de Covid-19, ont montré qu’ils étaient aussi capables de transformer leur pays en acceptant la réforme du législatif pour le faire passer de 945 à 600 parlementaires.
La stabilité précaire qui se dégage du scrutin a le mérite de rassurer pour l’heure Bruxelles. Pour Giuseppe Conte et le Mouvement 5 étoiles, qui avaient fait de cette réforme leur cheval de bataille, c’est une victoire bienvenue même si elle n’efface pas les graves problèmes qui minent le mouvement. Elle permettra au président du Conseil de ne pas être trop affaibli à l’approche des débats parlementaires sur le plan de relance que l’Italie devra présenter à l’Union européenne.
Depuis l’adoption historique en juillet par l’UE d’un plan de relance de 750 milliards d’euros pour contrer les effets de la pandémie, l’Italie doit établir sa feuille de route pour les 209 milliards d’euros qu’elle recevra de l’UE sous forme de prêts et de subventions. Giuseppe Conte aura la rude tâche de rassembler des forces centrifuges derrière un plan crédible. Il en a déjà esquissé les grandes lignes: investissements massifs dans une administration publique numérisée et dans des infrastructures obsolètes, réforme fiscale, relance d’une croissance anémique (0,8% lors de la dernière décennie). L’épreuve sera redoutable.
Mais Rome a l’obligation de réussir. Il en va de la confiance de Bruxelles. Mais celle-ci va dans les deux sens. Echaudés par la timide solidarité européenne au début du Covid-19, désenchantés par l’UE, les Italiens attendent avec impatience l’abandon du régime de Dublin et l’adoption promise par l’UE d’un mécanisme de solidarité obligatoire en termes de migration. Le défunt fédéraliste italien Altiero Spinelli n’en attendrait pas moins.
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Il y a 5 mois
L'europe doit faire profile bas. L'attitude honteuse de ces membres au début de la pandémie, qui ont fait preuve de cinisme et d'égoisme a éloigné les Italiens du projet européene comme jamais. Les italiens eux ont démontrés une attitude irréprochable, ils ont été dignes, disciplinés, ils ont sacrifiant leur économie pour la santé de leurs citoyens mais aussi pour celle de leurs "partenaires" européens en faisant barrage à la plus grave pandémie depuis un siècle. Ils ont communiqués les protocoles pour lutter contre ce maudit virus à tous, ils ont été un livre ouvert, tout le contraire des chinois qui nous ont mentis. Aujourd'hui l'Italie a les meilleurs résultats aujourd'hui contre cette pandémie. Alors un peu de respect et de gratitude pour les italiens svp. Leur demandé des comptes sans arrêt c'est irrespirable pour eux.
Il y a 5 mois
L'Europe a clairement des choses à se faire pardonner. Vous avez raison, l'attitude de Bruxelles en début de pandémie n'était pas digne des valeurs européennes. Aujourd'hui toutefois, l'UE fait deux pas en direction de l'Italie: 1) Elle entend abandonner le régime de Dublin sur la migration qui était très inéquitable pour l'Italie, au front des vagues migratoires comme la Grèce. 2) L'Italie sera l'un des principaux bénéficiaires du plan de relance de l'UE (750 milliards d'euros) en touchant 209 milliards sous forme de prêts et de subventions. Il était temps. Les Italiens, on peut les comprendre, se sont sentis un peu trahis par l'Europe. Selon un sondage publié la semaine dernière, 33% d'entre eux ne jugent plus l'appartenance à l'UE essentielle.
A contrario, l'Italie a aussi du travail à mener. Politiquement, et ce sera une gageure, elle devra trouver suffisamment d'unité pour s'accorder sur des projets de relance qui font sens et qui permettent à la Péninsule de se remettre sur les rails. Ce ne sera pas chose facile. Le Mouvement 5 étoiles, qui fait partie de la coalition gouvernementale avec le Parti démocrate, traverse une phase très difficile. Il n'arrive pas à s'ancrer dans le territoire et est miné de toutes parts.
L'Italie devra aussi réformer de fond en comble sa fiscalité, combattre la corruption. Quant à l'éternel problème du Nord/Mezzogiorno, des investissements intelligents pourraient en partie y remédier.
Il y a 5 mois
@ Monsieur Bussard. Merci de me répondre et bravo pour votre article. On peut en effet dire que, au vue des équilibres politiques subtiles, c'est une gageure que de diriger l'Italie. Mais ce n'est pas la seule nation a devoir faire face à de telles défis. Parlons de fiscalité, le Luxembourg est un paradis fiscal, les Pays-bas et l'Irlande pratique le dumping fiscal, qui permet aux entreprise italiennes notamment, mas pas que, d'ouvrir une boîte aux lettres permettant l'évasion fiscale de masse qui met les pays en difficulté. Et l'Europe est totalement responsable et complice de ces pratiques qui ruine certains états au profit d'autres. C'est donc un juste retour que de compenser ces pertes fiscales. On ne peut dès lors pas demander à l'Italie de réformer sa fiscalité seule, c'est maitenant aux autres aussi de faire des pas concrets dans une réforme globale fiscale européenne. Lorsque l'on aura règler de part et d'autres ces problèmes alors les pays pourront récupèrer des rentrées fiscales qui leur permettra d'investir dans les régions plus défavorisées. Vous citez le Mezzogiorno, on peut aussi parler de la différence entre l'ouest et l'est de l'Allemagne, de Paris et de la province, de la Catalogne et du reste de l'Espagne... etc. Sur le tème de l'immigration et de la non gestion européenne de ce problème, l'Italie n'attend plus rien de l'europe. C'est d'ailleur un gage encore plus grand que d'imaginer les européens s'entendent sur ce sujet. La aussi les pays de l'est profite des subventions, mais mettent leur veto quand il s'agit de partager le fardeau de l'immigration avec les Italiens.