Jeux vidéo: amis ou ennemis?
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En dénonçant le parti pris d’un reportage de «Temps Présent» consacré aux jeux vidéo, le blogueur Yannick Rochat relance la controverse autour de leurs prétendus effets néfastes

Les jeux vidéo sont-ils bénéfiques ou néfastes pour la santé? L’interminable controverse resurgit après la publication d’un article de Yannick Rochat, chercheur en humanités digitales et blogueur pour Le Temps. Dans sa tribune publiée mardi 14 juin, il dénonce le «traitement médiatique à charge» d’un reportage de Temps Présent, diffusé le 2 juin dernier sur la RTS et consacré aux jeux vidéo violents. Selon lui, les auteurs du reportage ont volontairement occulté diverses études démontrant «quantité d’effets positifs sur le développement» et associé de manière systématique «jeu vidéo, violence et addiction». Un «point de vue biaisé» qui contribue à alimenter la «stigmatisation des joueurs». Sur la Toile, les internautes s’emparent de ce sujet épineux à forte connotation émotionnelle.
«Posture terriblement rétrograde»
En se fondant notamment sur une étude américaine, le documentaire tente de démontrer que «tuer des civils à la kalachnikov augmente l’agressivité, désensibilise à la violence et diminue l’empathie». Une «posture terriblement rétrograde», pour Yannick Rochat, rejoint par bon nombre d’internautes. «Les journalistes de Temps Présent ont visiblement confondu corrélation et causalité, comme beaucoup de gens n’ayant aucune culture scientifique», commente Warren Smith sur la page Facebook du Temps. «Afin de produire un reportage équilibré, Temps Présent aurait aussi eu la possibilité d’examiner le domaine des serious games (utilisation du jeu vidéo dans un but éducatif).» «Simpliste, caricatural et racoleur, ajoute Didier Bonvin, journaliste spécialisé dans le multimédia. Il y a tellement de choses plus intéressantes à dire sur le jeu, notamment le cognitivisme et les facultés qu’il permet de développer.»
Des bienfaits multiples
Il est vrai que plusieurs études scientifiques dressent un tout autre diagnostic des effets des jeux en ligne sur le cerveau humain. Augmentation de la concentration, de l’attention ou encore de l’acuité visuelle, les bienfaits des jeux vidéo seraient multiples selon les recherches de Daphné Bavelier, professeure en neurosciences à l’Université de Genève. Des effets durables et significatifs s’observent également sur la mémoire et la créativité, selon une étude de l’Université de l’Illinois. A ce titre, l’article de Yannick Rochat réjouit les gamers, lassés d’être des «cibles faciles». «M. Rochat… Merci. Dieu que ça fait du bien ces propos plein de bon sens, commente Marce Mo. M. Ungar, la posture que vous avez adoptée dès la recherche de témoins pour ce reportage était plus que maladroite.»
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Face aux critiques, Christophe Ungar, journaliste à la RTS et auteur du reportage, se défend en rappelant que «même si le titre prête à confusion, cette enquête n’aborde que les jeux violents trop souvent utilisés par des mineurs dont le cerveau est encore plus plastique». S’il comprend la «réaction de ras-le-bol d’une partie (adulte) de la communauté des gamers face à ce qu’ils considèrent comme étant des critiques répétées et répétitives», le journaliste reste persuadé que le jeu vidéo est un «vecteur d’apprentissage (puissant), pour le meilleur mais aussi pour le pire».
Certes, une émission de 52 min suppose des choix et tout dire est impossible. Mais en évacuant un pan entier du débat, les auteurs s’exposent à des critiques attendues et, tout compte fait, légitimes. A l’arrivée: un discours simpliste qui ne rend pas compte de toute la complexité du sujet.
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