Pour lire cette chronique, un tour sur Palais-du-parlement.ch s’impose. Vous y explorerez le Palais fédéral dans ses moindres recoins. En son sein, ne manquez pas la salle du Conseil des Etats, qui offre d’imprenables rayons de soleil se frayant un chemin à travers les rideaux de dentelle saint-galloise. Pour entretenir le mythe, nous prétendrons ici que l’astre du jour éclaire les décisions de la chambre des cantons, quand sa voisine surchauffe sous sa chape de lumière artificielle.

Lire aussi: Modeste et spectaculaire: le double jeu du Palais fédéral

«Chaque habitant de ce pays connaît La Landsgemeinde [d’Obwald] du XVIIe siècle d’Albert Welti et de son ami Wilhelm Balmer qui orne la salle», nous annonce avec audace le site du parlement suisse. Moi-même, il n’y a pas si longtemps encore, j’ignorais jusqu’à l’existence de ces artistes. Désormais, leur fresque trône à mes côtés. Et parfois, lorsque les laïus se prolongent, mon regard glisse sur les 208 ampoules vissées dans le lustre d’une tonne et demie qui menace au-dessus de nos têtes, avant de plonger dans cette scène.

Dehors, les femmes et les enfants

Amassés, les citoyens de la première heure y délibèrent vigoureusement, tandis que s’ébattent quelques enfants en dehors de l’enceinte. En dehors, avec les femmes. La représentation poussiéreuse de la démocratie qui accompagne nos longues soirées d’hiver, de printemps, d’été et d’automne est celle de décisions exclusivement masculines. Evidemment, quand on siège dans un décorum figé dans son romantisme, on doit composer avec des images surannées.

Mais quand la seule œuvre picturale étale sur toute l’étendue de la salle une démocratie de privilèges dont des décennies de lutte ont fini par venir – en partie – à bout, cela démange doucement. Tant et si bien que mes collègues Elisabeth Baume-Schneider (JU), Brigitte Haeberli Koller (TG) et moi avons proposé, pour honorer les 50 ans du droit de vote des femmes, de revisiter en fuschia et pour quelques jours cette fresque.

Historique

Doucement et avec le sourire. Ainsi est né le trompe-l’œil Air de fête, de l’artiste Camille Scherrer, pour marquer dans les murs le temps qui avance. Geste symbolique et éphémère ou petite conquête territoriale, deux ans après l’ajout – définitif lui – du nombre «1971» aux dates qui ornent la salle. Prémices, on l’espère, d’une percée terrestre, où de nombreux sièges restent encore à habiller de fuschia:


Chronique précédente

Naturalisation: du privilège à la reconnaissance

Le Temps publie des chroniques et des tribunes – ces dernières sont proposées à des personnalités ou sollicitées par elles. Qu’elles soient écrites par des membres de sa rédaction s’exprimant en leur nom propre ou par des personnes extérieures, ces opinions reflètent le point de vue de leurs autrices et auteurs. Elles ne représentent nullement la position du titre.