Le Liban entre la détresse et l’espoir
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AbonnéOPINION. La capacité libanaise à se ressaisir dans l’épreuve n’est plus à démontrer, écrit Jacques Pilet, de retour du Liban

Retrouver le Liban, connu en des temps meilleurs, plongé aujourd’hui dans une détresse sans nom, est bouleversant. La monnaie s’effondre. l’Etat, rongé par la division et la corruption, est en voie d’effacement – il n’y a plus de présidence. Les banques qui volent l’épargne – tout en gardant des réserves à l’étranger – restent plus ou moins fermées. Plus d’électricité publique, plus de gaz, plus de distribution d’eau souvent. Le fuel et l’essence sont rares et hors de prix. La colère populaire gronde. Surprise pourtant: Beyrouth, comme d’autres, reste une ville animée. Les magasins et restaurants sont ouverts, les musées et lieux de culture aussi. Malgré la pauvreté grandissante qui affecte principalement la classe moyenne. Certes les riches et les super-riches vivent comme avant dans un luxe insolent, mais comment font les autres? L’énergie vitale de tant de Libanais est frappante; leur acharnement, leur débrouillardise au quotidien sont inouïes. Beaucoup sont aidés par la diaspora, les chanceux prévoyants ont pu sauver quelques économies de la griffe bancaire. Les ONG internationales paient leur personnel en dollars dits «fresh». Mais surtout, l’économie bringuebalante fonctionne encore. Alors que les milliards en provenance du Golfe se sont taris depuis longtemps. Le tourisme n’est pas tout à fait mort. L’agriculture produit encore de quoi satisfaire les besoins en fruits, légumes et volailles. Et, il faut le dire, quelques profitables trafics subsistent, entre autres avec les pays du Golfe et la Syrie, en dépit de très relatives sanctions. Ce petit pays (le quart de la Suisse) compte environ 4,5 millions d’habitants. Il a accueilli en plus 1,5 million de réfugiés syriens, aussi palestiniens et irakiens, aidés par l’ONU et d’admirables ONG libanaises. Ces hommes pèsent cependant lourdement sur son destin, bien qu’ils constituent une précieuse main-d’œuvre agricole. Comme hier, mais maintenant ils viennent avec leurs familles.