Editorial
Libérer le savoir scientifique
L’édition scientifique mérite une mise à jour: il est temps qu'apparaissent de nouveaux modèles privilégiant l’accès à tous aux fruits de la recherche
3 minutes de lecture
Pascaline Minet
Publié mardi 19 septembre 2017 à 20:47,
modifié dimanche 17 décembre 2017 à 11:45.
[En partenariat avec Le Monde] Toute cette semaine, Le Temps vous emmène dans les coulisses de la science qui se fabrique, découvrir les cinq plaies de la recherche actuelle.
- Premier épisode. «Publish or perish», quand la science met les chercheurs sous pression
- Deuxième épisode. Quand les éditeurs confisquent la science
- Troisième épisode. La revue par les pairs sous le feu des critiques
- Quatrième épisode. Dans les labos, des petits arrangements avec la science
- Cinquième épisode. Une science impossible à reproduire
- Vos témoignages sur le «Publish or perish»: stress, précarité, petits arrangements et grosse colère
- Alt-metrics, CRAC et bonus: dix choses à savoir autour des publications scientifiques
- Matthias Egger: «Les universités ont compris qu'elles devaient changer»
Le monde de la recherche ne tourne plus rond. Un seul critère prévaut aujourd’hui pour évaluer le travail des scientifiques: le nombre d’études qu’ils publient dans des revues spécialisées. Un système exténuant qui incite à privilégier la quantité sur la qualité. Plus de 2,5 millions d’articles scientifiques paraissent chaque année. En cette semaine de rentrée universitaire, nous avons décidé de vous dévoiler les travers de la publication scientifique – mais aussi les pistes envisagées pour la réformer – à travers une série de cinq articles.
Rendre l'accès aux publications scientifiques moins onéreux
Un des aspects les plus frustrants du système actuel? Le savoir scientifique demeure largement inaccessible. Les éditeurs spécialisés monnayent la lecture de leurs revues au travers de coûteux abonnements, auxquels seules les universités ont les moyens de souscrire. Les autres membres de la société – enseignants, créateurs de start-up, journalistes, etc. – en sont privés. Un comble, quand on considère que la vaste majorité de la science est produite grâce à l’argent du contribuable.
Et si, enfin, on libérait la publication scientifique? Cela fait près de vingt ans que des solutions d’édition scientifique en accès ouvert existent. Elles permettent aux chercheurs de divulguer leurs résultats en ligne, de manière à ce qu’ils soient consultables par tous. Les revues en accès libre, dont certaines bénéficient désormais d’une large reconnaissance, accélèrent la diffusion de la science et pourraient la rendre moins coûteuse.
Lire aussi: Quand les éditeurs confisquent la science
Un certain conservatisme du milieu scientifique, couplé à la mainmise de grands éditeurs peu désireux de renoncer à leur modèle, explique sans doute que le développement de l’accès libre ait tardé. En 2017 encore, seule une minorité des études est publiée en open access. Mais les bailleurs de fonds de la recherche européens semblent bien décidés à accélérer le mouvement: ils sont de plus en plus nombreux à exiger que les fruits de la recherche publique soient consultables par tous.
Plusieurs solutions à envisager
On ne peut qu’encourager cette évolution. La situation de monopole des éditeurs traditionnels dessert la recherche. Ceux qui la produisent tout comme ceux qui s’y intéressent auraient intérêt à bénéficier d'un système plus ouvert. Et si les revues en accès libre offrent une partie de la solution, d’autres proposent d’ores et déjà de voir plus loin.
Des serveurs de prépublication comme arXiv (en physique) et bioRxiv (en biologie) permettent de rendre publics des travaux bruts, avant de les publier dans des revues classiques. Le site PubPeer propose, quant à lui, aux scientifiques de commenter et évaluer des études déjà parues, inversant le processus de l’édition traditionnelle où l’article est amendé avant d’être publié. Et si, enfin, on réinventait la publication scientifique?