Mitage: une jeune et verte désillusion
ÉDITORIAL. En rejetant assez sèchement l’initiative «Stopper le mitage», les Suisses ne font pas preuve d’indifférence face aux transformations de leur paysage. Ils sont cohérents avec leurs précédents votes et ont confiance dans la gestion nouvelle du territoire par les autorités. Mais ils ne sont pas prêts à remettre en cause la croissance économique, démographique et de la mobilité.

Sur le petit et précieux territoire habitable que les Suisses ont à leur disposition, l’étalement urbain est une préoccupation largement partagée. Non seulement par les nostalgiques d’une Suisse plus rurale et moins peuplée, mais surtout par tous ceux qui font d’un paysage diversifié, grâce au maintien des surfaces agricoles, un élément important de la qualité de vie.
Les citoyens ont exprimé clairement ces dernières années une sensibilité croissante à cet égard. Faut-il rappeler qu’ils ont dit oui en 2012 à l’initiative de Franz Weber sur les résidences secondaires, un message choc, même s’il concernait surtout les régions alpines? L’année suivante, à l’issue d’une campagne ayant enflammé tout le Plateau, ils ont accepté par 63% la nouvelle loi sur l’aménagement du territoire, la LAT. Les milieux économiques qui s’étaient engagés contre la réforme ont perdu.
Pour s’être fait des illusions sur ces précédents scrutins, les Jeunes Verts, tout comme les partis de gauche qui les soutenaient mollement, ont échoué à leur tour. Ils se sont heurtés non pas à l’indifférence des Suisses, mais au souci des électeurs de rester cohérents avec leur vote d’il y a six ans à peine. Et à la confiance dont les mêmes font preuve envers les autorités, depuis que celles-ci se sont engagées à appliquer à la gestion du territoire les instruments plus efficaces offerts par la nouvelle LAT.
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Le message populaire déjà donné était suffisamment clair pour ne pas revenir sur le sujet. Pour preuve, la campagne en vue de ce 10 février n’a jamais vraiment pris. Il était bien trop tôt pour décréter l’échec de la LAT. Trop tôt pour accepter le véritable changement de paradigme qui était proposé: remplacer une solution évolutive et fédéraliste par un dispositif centraliste et absolu dont la mise en œuvre promettait de grandes difficultés. Certes, la LAT s’efforce de contenir l’étalement urbain, sans prétendre le condamner. Mais la volonté implicite des initiants de freiner, à travers «Stopper le mitage», la croissance économique, démographique et de mobilité sur laquelle le pays a basé son modèle de réussite, a fait long feu. Les Suisses n’y sont de toute manière pas prêts.
Pour autant, le débat que les citoyens mènent au sujet de leur territoire, qui reste sous leur surveillance, est loin d’être terminé. La LAT devra démontrer son efficacité dans la réduction des zones à bâtir excédentaires. Par ailleurs, une nouvelle révision de cette loi est en cours, qui porte sur les constructions en zone agricole. Il faudra veiller à ce que le régime adopté pour ce volet, sur lequel les cantons espèrent garder une large marge de manœuvre, n’ait pas pour effet de favoriser sournoisement le mitage au lieu de préserver le paysage rural.
Les résultats: Le Valais sera le champion du non à l’initiative sur le mitage