L’homme qui voyait la poésie dans le Coran

Quand il déposa sa thèse de doctorat en 1947, les murs de l’Université al-Azhar ont, dit-on, violemment tremblé. Mohammed Ahmad Khalafallâh, écrivain et penseur moderniste égyptien (1916-1991), soutenait que «la parole sainte est une parole allégorique qu’il faut comprendre non pas commeun ensemble figé mais comme une direction morale» (lire l’article de Rachid Benzine dans Changer l’islam, dictionnaire des réformateurs musulmans des origines à nos jours, sous la direction de Malek Chebel, Albin Michel, 2013). Non seulement l’université lui refusa sa thèse, intitulée «L’art narratif dans le saint Coran», mais elle lui refusa même de pouvoir la défendre, accusant son auteur de «crime suprême d’athéisme et d’ignorance» (selon Reinhard Schulze, qui tient ces informations du professeur Jacques Jomier). Né en 1916, de mère soudanaise, dans la province de Charqiya en Egypte, Mohammed Ahmad Khalafallâh passe toute son enfance à mémoriser le Coran dans un village de Basse-Egypte. Dans les années 30, il entre à la Faculté des lettres de l’Université du Caire. Sa rencontre avec le grand penseur Amin al-Khuli est une révélation qui l’oriente vers l’exégèse coranique.

Suite aux remous provoqués par sa thèse, il recommence une nouvelle thèse de lettres sur un sujet non religieux. Docteur en 1952, il se consacre à diverses tâches dans l’enseignement et finit sa carrière au Ministère de la culture.

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