Les nouvelles zones non-fumeurs des CFF font tousser
Vivre ensemble
Des quais de gare sans cigarette: l’expérience que va mener l’ex-régie fédérale au 1er février dans six gares de Suisse déclenche des torrents de commentaires, soulagés ou fumasses

Les CFF l’avaient annoncé, ils vont tester pour quelques mois à compter du 1er février les gares sans fumée, pour améliorer le confort des lieux et celui des voyageurs. Six gares sont concernées dont, en Suisse romande, celles de Nyon et de Neuchâtel. Six familles de commentaires, tous glanés sur le Web.
Lire aussi: Le Tessin discutera de l’interdiction de fumer à l’extérieur
1. Famille des soulagés. Ils sont nombreux. «Je n’attends que ça pour reprendre le train. Je souffre d’asthme allergique et même avec un masque, je ne peux pas prendre le train tellement l’air est toxique dans certaines gares (Bâle, par exemple)», écrit une lectrice de 20 minutes. «Les fumeurs ont eu les pleins pouvoirs pendant des décennies, mais c’est terminé», se réjouit Jean-Paul. «Il n’y a pas que les enfants qui n’ont pas envie d’avoir un cancer!» ajoute un pendulaire. Clairement, l’argument de la fumée passive joue – même si les CFF prudemment évitent l’expression. «En Allemagne, c’est le cas depuis longtemps et ça fonctionne très bien!» ajoute un lecteur. Et cette ironique remarque: «Mon Dieu, interdire quelque chose qui est néfaste pour la santé de tout le monde! C’est totalement irrationnel!»
2. Famille des bien élevés. Ils sont nombreux aussi, en tout cas sur la Toile. «Je suis fumeur et fais toujours attention à m’éloigner des gens et au sens du vent, explique un internaute. Pareil sur les terrasses. Pour moi, le vrai problème est le manque de courtoisie et de considération.» «Un petit cendrier de poche et le tour est joué, mais c’est vrai que c’est tellement dur d’être civilisé», écrit aussi un certain Bobby. «Nous ne savons plus vivre en bonne intelligence. Chacun pour soi et Dieu pour tous. C’est bien triste», commente Biba.
3. Famille des pas d’accord (1). Eux aussi sont nombreux. «Zones fermées OK. Mais pour l’extérieur, faut pas exagérer. On osera encore vivre à Neuchâtel?» demande Nath. «Mettez déjà «plus» de cendriers et poubelles!» enchaîne Shelby. Ce n’est pas pour rien que la Suisse compte encore un quart de fumeurs… «Par contre les odeurs corporelles, de malbouffe, la pollution des villes, ça ne vous dérange pas?» Les cris des jeunes enfants, les parfums trop forts et les portables sont plus gênants que la fumée pour certains. «Jusqu’ici j’utilisais les cendriers et je faisais attention. Dès demain, je jetterai mes mégots allumés dans le train. Quand l’intolérance mène à l’intolérance.»
Lire aussi: La cigarette bientôt bannie des gares?
4. Famille des pas d’accord (2). Les fumeurs sont en effet rejoints par des libertariens, qui refusent que l’Etat intervienne dans leur sphère privée. «Oui, la liberté de chacun s’arrête là où commence celle des autres.» «On arrête de mettre des interdits? A quoi rime cette prohibition? Même en plein air, on ne peut plus fumer? Ce monde aseptisé devient fou» pour Padac. «Les interdictions des CFF font passer l’ex-URSS (ou l’actuelle UE) pour un pays de liberté», se lamente V84x4.
5. Famille des inquiets. «Continuez, le jour où Philip Morris s’en ira de Neuchâtel, la ville entière va pleurer, et le canton pourra alors se demander comment s’en sortir, je vous le garantis.» Plusieurs internautes notent le hiatus qu’il y aurait à interdire le tabac dans la gare d’une ville où en vivent plusieurs centaines de familles. Hasard? Neuchâtel a justement été choisie pour tester les quais avec une partie réservée aux fumeurs.
6. Famille des perspicaces. Enfin, les CFF sont accusés de s’attaquer aux petits problèmes mais pas aux grands. «Chers CFF, et si l’on parlait des désagréments liés au manque de place aux heures de pointe, à la vétusté de certains de vos wagons??» demande Deeone. «Et si l’on parlait plutôt du manque de contrôle dans les trains, du manque de places et du prix exorbitant des trajets?» reprend Justice. La palme de la mauvaise foi à ce commentaire: «Alors le prix des billets va baisser… Moins de chauffage dans les wagons, moins de petites mains pour nettoyer… Les CFF vont pouvoir virer quelques nettoyeurs… Economies, économies, économies…»
Le Temps publie des chroniques et des tribunes – ces dernières sont proposées à des personnalités ou sollicitées par elles. Qu’elles soient écrites par des membres de sa rédaction s’exprimant en leur nom propre ou par des personnes extérieures, ces opinions reflètent le point de vue de leurs autrices et auteurs. Elles ne représentent nullement la position du titre.