Praille-Acacias-Vernets: passer du mirage à la réalité
Editorial
EDITORIAL. Vieux de quinze ans, le projet PAV veut transformer une zone industrielle en quartiers où il fait bon vivre. Pour la première fois, les Genevois sont consultés dans un vote populaire. Malgré les imperfections de la loi, la refuser prolongerait une situation frustrante

Il existe de bonnes raisons de voter non, dimanche, à la modification de loi touchant le grand projet urbanistique genevois, Praille-Acacias-Vernets (PAV). Premièrement, on ignore quelle somme d’argent il faudra consacrer à ce grand geste. Construire des logements prioritairement à destination de ceux qui gagnent le moins est légitime, de la part du pouvoir public, et correspond indéniablement à un besoin prépondérant. Mais cela coûte cher. Au point de creuser la dette ou de devoir augmenter les impôts, deux secteurs où Genève a déjà des appétits pantagruéliques? Personne n’a la réponse, pas même les responsables politiques qui se sont succédé durant quinze ans au pilotage de ce dossier.
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C’est que, second motif de scepticisme, le vote de dimanche ne dit rien sur un aspect essentiel du mécanisme à mettre en place afin que des logements, enfin, sortent de terre au PAV. Comment financer les indemnités à verser aux entreprises afin qu’elles libèrent les parcelles qu’elles occupent actuellement, propriété de l’Etat? On aurait pu penser que cette question, certes complexe et ingrate, fût, si ce n’est réglée, du moins élaborée il y a quinze ans. Il n’en est rien.
Hautes ambitions
Ce suffrage populaire a d’ailleurs l’immense mérite d’exposer au grand jour l’état d’avancement de cette reconfiguration urbaine. Tous les élus ont affiché de hautes ambitions pour le PAV, à juste titre. Cette zone industrielle et artisanale devait se transformer en quartiers où il fait bon vivre et travailler, opération censée résoudre une partie de la crise du logement et de la mobilité qui frappe Genève depuis trop longtemps. A l’heure du vote, force est de constater qu’il y a loin de la coupe aux lèvres.
Il ne s’agit pas, ici, de dire que les ministres et les députés n’ont rien fait. Certains ont beaucoup travaillé. Ils n’ont d’ailleurs pas démérité. Plusieurs obstacles ont été franchis, plusieurs blocages dépassés grâce à leur obstination. Interrogez-les, et ils vous diront que les choses avancent bien, alors que les tours promises n’existent qu’en dessin!
Voilà l’unique raison de glisser un oui dans l’urne. Elle surpasse à elle seule la somme des doutes exposés plus haut. La loi soumise au vote ne résout pas l’équation du PAV, mais elle représente un progrès par rapport à la situation d’aujourd’hui, qui se prolongerait en cas de non. Introduire une portion, même congrue, même bizarre, de propriété par étages permettra de faire enfin avancer des plans financiers qui dorment dans des tiroirs. Cet élan est plus nécessaire que des querelles sur des pourcentages de logement social. Il faut espérer que ce vote donne enfin un cœur à ce projet qui n’en a pas.
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