Les puissances économiques de demain
CHRONIQUE. Malgré les inquiétudes quant à un déclin occidental, Etats-Unis et Europe vont rester à la pointe de l’innovation scientifique et, sauf changement radical, l’économie chinoise va cesser son rattrapage, présage l’économiste Charles Wyplosz
La boule de cristal a parlé. Les pays occidentaux sont en déclin, l’ascension de la Chine est inéluctable et son alliance avec la Russie va créer un immense bloc dominant, l’Inde sera le prochain miracle économique. Et si la boule avait tout faux?
Commençons par la Chine. Entre 1995 et 2019 (avant le covid), son PIB par habitant a augmenté de 9,1% par an en moyenne. A titre de comparaison, celui des Etats-Unis a crû de 1,7% et celui de l’Allemagne de 1,5%. Une formule 1 contre une trottinette! Oui mais, en 2023, converti en dollars, ce revenu moyen de la Chine n’est toujours que 31% de celui des Etats-Unis. Le rapport était en 1995 de l’ordre de 6%, faisant de la Chine un pays extrêmement pauvre. Elle est sortie de cette pauvreté à partir des années 1980 en libéralisant son économie et en s’intégrant au commerce mondial, ce qui lui a permis de commencer à rattraper son retard en adoptant peu à peu les technologies occidentales. Elle a suivi en cela le précédent de l’Europe et du Japon d’après-guerre. Mais la vitesse de rattrapage diminue au fur et à mesure que l’on se rapproche du chef de file. C’est ce qui est arrivé à l’Europe et au Japon dans les années 1970, quand ils ont cessé de rattraper les Etats-Unis. Depuis lors, comparé aux Etats-Unis, le revenu par habitant de l’Allemagne s’est stabilisé aux alentours de 80%, un écart qui ne se réduit plus. De fait, la croissance de la Chine a aussi ralenti, passant de 12% par an au départ à 5% ces derniers temps. Par rapport à ce qui s’est passé en Europe et au Japon, le ralentissement est prématuré.