Hexagone Express
Abonné«L’organisation de l’Etat et de notre action doit profondément changer», a affirmé Emmanuel Macron lors de son intervention télévisée du 14 juin. Vrai. Mais comment s’y prendre dans un pays où l’épidémie de coronavirus a de nouveau démontré que les Français attendent tout de la puissance publique?

A la fin des années 1990, le scientifique Claude Allègre, ministre de l’Education nationale dans le gouvernement socialiste de Lionel Jospin, avait promis de «dégraisser le mammouth». L’idée, émise par ce géophysicien rugueux mais féru de comparaisons internationales, était alors assez simple: diminuer le nombre de fonctionnaires, dans un ministère qui en compte environ 800 000, peut paradoxalement améliorer le service éducatif rendu. Résultat: le «mammouth» s’est rebellé et l’apprenti-dégraisseur a été limogé. Non sans avoir corrigé le tir dans une formule ciselée pour plaire aux syndicats: «Si je parle de mammouth, c’est parce qu’il y a une quantité considérable de gens. Ce que je veux, c’est muscler le mammouth et le rendre un peu plus effilé, un peu plus souple…» Fin de partie. Vingt ans plus tard, le dégraissage n’a toujours pas eu lieu et le pachyderme, au vu des controverses à répétition sur la rentrée scolaire post-Covid-19, reste perclus de rhumatismes.
Revisiter le présent à la lumière du passé
Ce petit rappel en dit long sur l’impossibilité, en France, d’une réforme de l’Etat. Emmanuel Macron, qui s’est engagé le 14 juin à «revoir l’organisation de l’Etat et son action» afin de «bâtir de nouveaux équilibres dans les pouvoirs et les responsabilités», devrait lire à ce sujet Virus ennemi (Gallimard), le petit ouvrage tout juste signé par l’historien Jean-Noël Jeanneney. Jeanneney orchestre, chaque samedi sur France Culture, une passionnante Concordance des temps, revisitant le présent à la lumière du passé.