ÉDITORIAL. Alain Berset a été victime d'un chantage par une femme. L’occasion de régler des comptes politiques, alors que le ministre est critiqué pour sa gestion de la crise sanitaire. Une attaque rendue possible par la moralisation rampante à l’œuvre dans notre société

Le moment est idéalement choisi. Alors que le conseiller fédéral socialiste Alain Berset est critiqué pour sa gestion de la pandémie et affaibli politiquement, la Weltwoche et l’UDC derrière elle divulguent une affaire au léger parfum de soufre. Le premier de la classe a été victime d'un chantage par une femme, les données des appareils de cette maîtresse chanteuse désormais condamnée ont été supprimées par le parquet fédéral, l’ordonnance comporte des noms caviardés. Une petite bombe qui explose à la figure du mâle alpha au Borsalino, et qui laisse entrevoir de croustillantes perspectives.
Lire aussi l'article lié: Alain Berset est-il affaibli politiquement?
Que la classe politique et les médias s’interrogent sur l’empressement de la justice à gommer les traces de ces échanges énigmatiques, c’est naturel. Il ne faudrait pas qu’Alain Berset ait bénéficié d’un traitement de faveur. Mais que certains invoquent habilement le risque de vulnérabilité du ministre pour rappeler l’importance de l’intégrité dans la vie privée, c’est une autre histoire. Car ce doute n’est qu’un prétexte qui cache un phénomène insidieux: la moralisation rampante à l’œuvre dans notre société.
On voit mal en effet que ces échanges compromettants entre Alain Berset et celle qu’on a appelée pour la circonstance «Scarlett Gehri» et pas «Liselotte Rösti», un pur hasard sans doute, soient de nature à mettre en péril l’Etat. Que reste-t-il alors? La justice ayant parlé de «faits privés», on imagine plutôt des secrets d’alcôve que des secrets d’Etat. Or, on ne sache pas que le flirt ou l’adultère empêchent l’action politique. Mais on le laisse entendre, pour discréditer celle-ci et régler des comptes tout en flattant les nouveaux moralisateurs.
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Le mythe du gendre idéal s’est effondré avec quelques messages et trois photos? La belle affaire. A ce stade, rien ne permet de penser qu’Alain Berset ait commis des actes répréhensibles au regard du respect élémentaire. Il s’agit plus vraisemblablement d’une histoire banale, qui mérite au mieux un regard amusé. Pour juger de la crédibilité d’un élu, il faut s’arrêter au seuil de sa chambre à coucher et de sa messagerie. Et lui laisser le droit d’être immoral au-delà. Pendant quelques décennies, on a eu le bon goût d’admettre et d’appliquer ce principe. Il est à craindre désormais que l’exigence de bonne conduite l’ait remplacé.
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Il y a 2 mois
Certainement il s 'agit d' un changement d'orientation conséquence du changement de propriétaire. Toujours est-il que en l 'espace de quelques mois vous êtes tombé aussi bas que le GHI. Je suis abonné au Temps depuis des années. Cette fois-ci c'est trop. C'est fini, vous avez perdu et un abonné et un lecteur. Adieu
Il y a 2 mois
Avec l'article sur Darius, c'est vrai que cela commence à faire beaucoup... Les abonnés du Temps ignoraient qu'ils cautionnaient un "France Dimanche" en devenir. C'est vous qui voyez si vous voulez les dégoûter.
Il y a 2 mois
Les deux personnes qui se sont exprimées avant moi ont-elles lu et compris l'article de Mme Lugon ? C'est douteux. Au contraire de ce qu'affirment les commentaires rédigés, l'article combat la presse de caniveau et/ou de totale mauvaise foi type "Weltwoche" et défend le droit au respect de la vie privée, y compris des hommes et femmes politiques. J'y adhère totalement et félicite Mme Lugon.
Il y a 2 mois
Votre article pose des questions aux lecteurs, pas forcement les bonnes.
Mais vous êtes-vous posée la question, est-ce le seul Mr. Berset à "bénéficier" d'un caviardage dans une affaire comme celle-ci ?
Non ! A Genève cela existe aussi on l'appelle la procédure VIP une directive faite sur mesure par Le Procureur Jornot et avalisée par la cheffe de la Police Monica Bonfanti, pour protéger le pouvoir politique et judiciaire entre autres et là pas de journalistes pour se poser des bonnes questions sur cela...
Il y a 2 mois
La situation d'Alain Berset est bien compliquée. Quoi qu'il fasse, il est critiqué. Certains pensent qu'il en fait trop, d'autres qu'il n'en fait pas assez. Personne pour dire qu'il fait au mieux dans une situation très difficile. C'est dans ce contexte que la Weltwoche, l’UDC et Roger Köppel profitent de l'attaquer. C'est odieux. Le journal insupportable est la Weltwoche.
Il y a 2 mois
"Une petite bombe qui explose à la figure du mâle alpha au Borsalino, et qui laisse entrevoir de croustillantes perspectives."
Le temps est vraiment tombé bien bas. Esperons que la fondation fasse un peu le ménage chez ses rigolos.
Il y a 2 mois
Il ne faut pas oublier de lire Michel Guillaume en page 6: "Tout laisse à penser (?) qu'il s'agit là d'une banale affaire de coeur" ... qui devient plus loin "Cette affaire de coeur" C'est amusant comme ici on rabaisse la femme sans vergogne. Qu'en pensent les féministes ? Rien ? à l'ère de #MeToo ? Quant à la déontologie journalistique, parlons-en. Ou, comment une hypothèse au début de l'article devient un fait vers la fin.
Il y a 2 mois
Si cette dame avait eu de bonnes raisons de se plaindre d'Alain Berset, elle aurait pu aller en justice. Faire du chantage est inadmissible. Supposer que c'est une histoire banale ne justifie pas un article.
Il y a 2 mois
Ce fait divers semble avoir été instrumentalisé par un représentant de l’UDC via son journal (« La semaine du monde »).
Sous réserve d’une anomalie de procédure que pourrait encore détecter le MJP, la justice a classé cette triste affaire de chantage grotesque et la presse suisse l’à relayé à l’unisson.
L’actualité, tout domaine confondu, devrait être suffisamment riche et variée pour alimenter l’analyse, la compréhension et éventuellement une synthèse, source d’options stratégiques utiles à la société.
Il y a 2 mois
"Pour juger de la crédibilité d’un journaliste il faut s’arrêter au seuil de sa chambre à coucher et de sa messagerie. Et lui laisser le droit d’être immoral au-delà. Pendant quelques décennies, on a eu dans la presse dite sérieuse le bon goût d’admettre et d’appliquer ce principe. Il est à craindre désormais que l’exigence de bonne conduite l’ait remplacé".
Il y a 2 mois
Il me semble surtout que Koeppel cherche à rentabiliser son scoop, ce qui n'est pas joli du tout. Mais sur ce plan, est-il vraiment le seul dans le paysage médiatique suisse ? L'autocritique des médias pourrait commencer par là. En attendant, que celui qui n'a jamais pêché jette la première pierre !