De plus en plus de couples recourent à des mères porteuses, malgré l’interdiction de cette pratique en Suisse. Peut-on mieux encadrer ce phénomène, pour le bien de l’enfant?
Editorial
Bricolage inadéquat
Irritant. C’est ainsi que le Conseil fédéral qualifie, dans un récent rapport, la façon dont la Suisse tente de gérer le phénomène de la maternité de substitution. La gestation pour autrui est clairement interdite en Suisse. Mais des couples contournent la loi pour recourir à des «ventres à louer» à l’étranger. Parfois dans des conditions sordides.
Au retour, ces couples mettent les autorités qui les détectent devant le fait accompli. Ces dernières finissent souvent par devoir régulariser la situation a posteriori, pour le bien de l’enfant. Renvoyer un bébé auprès d’une mère porteuse à Tbilissi qui n’en a jamais voulu, serait totalement absurde.
Voilà qui revient donc, dans les faits, à fermer un peu les yeux sur une pratique interdite. Et, par ricochet, à encourager le «tourisme de la procréation». Une situation malsaine, qui frise l’hypocrisie.
Interdire n’est, on le voit, pas efficace. Reste alors le besoin de mieux encadrer la pratique, qui a pris de l’ampleur ces dernières années. Un défi difficile, tant les disparités juridiques entre Etats sont colossales. L’infertilité peut être vécue comme un fardeau, personne ne le nie. Mais vouloir un enfant à tout prix ne doit pas devenir une obstination égoïste, et occulter des problématiques aussi importantes que celle de l’exploitation des femmes. Ou du droit de l’enfant à connaître ses origines.
En Géorgie et en Ukraine, la gestation pour autrui devient un marché toujours plus florissant. Les femmes qui louent leur ventre le font généralement par détresse financière: elles se situent bien en dessous du seuil de pauvreté. La situation est plus saine et contrôlée aux Etats-Unis. L’histoire atypique de Claudio et de Manlio, que nous relatons, le démontre.
Le statu quo n’étant guère satisfaisant, une concertation internationale permettrait de poser des limites cohérentes au phénomène et d’éviter les dérives. Les parents d’intention doivent aussi être davantage sensibilisés aux conséquences de leurs actes.
Dans tout ce débat, un point, essentiel, ne doit pas être oublié: l’intérêt de l’enfant doit rester au centre des préoccupations et dicter toutes les décisions.