ÉDITORIAL. Le canton se lance dans une nouvelle genevoiserie. Une crise couve autour de la nomination du nouveau recteur de l’université. Osera-t-on choisir une personne hors du sérail?

On le visualise avec un ours, une chemise à carreaux et son accent. Eric Bauce, professeur au département des sciences et de la forêt de l’Université Laval, qui a été vice-recteur de l’institution et de ses 47 000 étudiants pendant dix ans, à la tête de l’Université de Genève? Pour la première fois en 450 ans, la plus haute école du canton serait dirigée par une personne qui ne vient pas du sérail, ni cantonal, ni même national. Comment ose-t-on?, interrogent certaines voix à l’université, au parlement et au sein même du Conseil d’Etat. L’assemblée de l’université a désigné, comme le veut la loi, le futur recteur. Le Conseil d’Etat doit nommer cette personne ou refuser de le faire, prochainement. Rien dans la loi, d’ailleurs, ne stipule qu’il ou elle doit être confédéré, ou avoir des liens avec notre pays. La procédure et, pour le coup, les institutions sont respectées, n’en déplaise à certains.
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Que le profil requiert divers talents est évident. Il faut être à la fois un académique visionnaire, un manager expérimenté et un influent connaisseur du système suisse et européen. Quelle dimension est la plus importante? Comprendre son environnement politique, ses partenaires, et pouvoir les influencer est évidemment nécessaire. Mais porter et gérer un projet pour les 25 000 étudiants et collaborateurs de l’Unige paraît totalement crucial. Et permettre à Genève de rester sur la carte mondiale du savoir, développer des collaborations avec les meilleures universités du monde, en Chine, en Amérique, en Afrique et bien sûr en Europe, identifier les domaines de recherche du futur, attirer les brillants cerveaux l’est plus encore. C’est ce qui fera rayonner l’université, qui se targue d’ailleurs avec fierté d’être exceptionnellement internationale, et permettra de rendre à la cité, à terme, par le biais de création d’emplois et de richesse, ce qu’elle a donné.
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Repenser le modèle
Cette nouvelle genevoiserie en devenir pose d’autres questions: pourquoi une seule candidature interne à l’université a-t-elle émergé? Quel modèle de rectorat peut-on concevoir pour donner envie à des chercheurs ou chercheuses charismatiques de se lancer dans cette fonction sans avoir le sentiment de devoir abandonner la science? Au-delà du profil de ce futur haut responsable, qu’il ne nous est pas donné de juger, une chose est sûre: ne pas le nommer parce qu’il n’a pas d’attaches avec la Suisse serait une impressionnante démonstration de provincialisme. Que cette crise permette de repenser la direction de l’université de demain! Avec à sa tête un professeur canadien, ou pas.
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