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Valentin, 11 ans, a testé «Mondes rebelles junior»

Une nouvelle encyclopédie explique aux enfants les conflits contemporains. Valentin y a appris que les talibans n'étaient pas un pays, a confirmé son point de vue que les enfants-soldats étaient une des choses les pires au monde, et en a conclu qu'il comprenait mieux l'actualité après l'avoir consultée. Interview

Les conflits, les guerres, et la politique internationale ouvrent presque chaque jour le journal télévisé. La presse quotidienne et périodique en est pleine. Les enfants absorbent une grande partie de ces informations. Ils écoutent les conversations des adultes. Que comprennent-ils? Les Editions Michalon publient, en plus de «Mondes rebelles», l'encyclopédie des conflits contemporains de Jean-Marc Balencie et Arnaud de La Grange, une version destinée aux enfants: «Mondes rebelles junior». Valentin, 11 ans l'a lu, et donne son avis.

Le Temps: Tu viens de lire «Mondes rebelles junior», de quoi s'agit-il?

Valentin: Cela parle des conflits, des guerres, des guerres civiles. Toujours des choses qui se passent maintenant. Ils parlent aussi du passé parce qu'il y a des guerres qui ont commencé il y a longtemps.

– Est-ce qu'ils parlent d'événements dont tu as entendu parler à la télévision?

– Oui. Par exemple l'Afghanistan, ou les enfants-soldats qu'on trouve en Afrique, par exemple au Liberia et dans d'autres pays.

– Qu'est-ce que c'est, pour toi, les enfants-soldats?

– Des enfants qui ont été kidnappés ou abandonnés et qui sont dressés pour devenir des soldats. J'aimerais bien que ça n'arrive pas. Les soldats adultes, ils choisissent, mais pas les enfants. C'est ce qu'il y a de pire. Un peu comme la pédophilie: les enfants sont obligés de faire des choses qu'ils ne peuvent pas décider librement.

– Est-ce qu'il y a des événements que tu ne comprenais pas et que tu as mieux compris grâce à ce livre?

– En particulier ce qui se passe en Afghanistan. C'est difficile de comprendre en lisant les journaux, parce qu'il faudrait les avoir lus la première fois qu'ils parlent d'un conflit. Ensuite, il faudrait chaque fois reprendre depuis le début. Ce livre explique bien comment cela s'est passé, du début jusqu'à la fin, comme si c'était une histoire.

– Est-ce qu'ils parlent des attentats aux Etats-Unis?

– C'est ce qui est bien. Le livre est très récent. Il y a les attentats. Quand ça s'est passé, j'avais compris que c'était grave, parce qu'une puissance mondiale avait été attaquée. Et aussi parce que le responsable était Ben Laden. Il voulait punir les Etats-Unis. Ensuite, les Etats-Unis ont riposté, avec l'aide de l'Alliance du Nord, qui a fini par reprendre possession de Kaboul qu'elle avait dû abandonner aux talibans. En fait c'est l'Alliance du Nord et les talibans qui se disputaient l'Afghanistan. Dans le livre, cela va jusqu'au commencement de la riposte américaine.

– Est-ce que ce livre a changé ta manière de comprendre les événements?

– Je comprends mieux. Il y avait des informations que je ne comprenais pas du tout. Par exemple, pour l'Afghanistan, je pensais que les talibans étaient un pays, que l'Afghanistan était un autre pays, et que l'Alliance du Nord, c'était des gens des Etats-Unis. Et on disait qu'il y avait la guerre en Afghanistan depuis très longtemps, mais je ne savais pas pourquoi. Maintenant, je le sais. Avant, les Etats-Unis étaient avec les talibans. En 1998, comme Ben Laden était devenu l'ennemi public numéro 1, les Etats-Unis ont soupçonné les talibans de le couvrir. C'est pourquoi ils se sont retournés contre eux.

– Comment les chapitres sont-ils organisés?

– Il y a toujours une carte de la région ou du pays, avec un court résumé du conflit. Il y a des photos. Ils expliquent ce qui s'est passé avant. Et ce qui se passe en ce moment. Il y a souvent un encadré avec un fond jaune et une photo commentée. Pour l'Afghanistan, il y a la photo de Ben Laden accompagnée d'informations sur son histoire personnelle. Il y a aussi un lexique. Quand on lit des informations, il y a des mots qu'on peut ne pas comprendre, comme nationalisme, ou communisme… Le lexique donne les définitions de ces mots. Il est surtout utile pour les abréviations ou les sigles, comme PIB, qui ne sont pas toujours expliqués dans les journaux.

– Tu as commencé par quel pays et quel événement?

– J'ai d'abord lu l'avertissement qui est au début: il décrit la manière dont sont construits les chapitres. Et il y a aussi une définition des guerres contemporaines et des institutions qui sont impliquées dans ces guerres. Ils parlent de l'ONU, des casques bleus qui servent à faire régner la paix.

– Il y a une armée de l'ONU?

– Les casques bleus appartiennent à l'ONU, mais ils viennent de plusieurs pays, parce que l'ONU c'est l'ensemble des pays qui se sont réunis. Les Etats-Unis, la France, les autres… mais pas la Suisse. Il y a aussi ceux qui font les guerres. Pratiquement dans toutes ces guerres, il y a des seigneurs de la guerre qui la contrôlent et qui l'organisent. Il y a aussi des politiciens, parfois ce sont les mêmes. Il y a les enfants-soldats, les mercenaires qui font la guerre avec un pays et qui se font payer, les trafiquants d'armes…

– Qu'est-ce qu'il y a après cette introduction générale?

– Le livre est divisé en plusieurs parties, consacrées chacune à un continent. On nous donne une vue générale, très résumée. Après, les chapitres détaillent les régions et les conflits un à un.

– Après avoir lu ce livre, est-ce que tu as l'impression que nous sommes dans un monde où il y a beaucoup de paix, ou beaucoup de guerre?

– On ne peut pas le dire. Parce qu'il faudrait qu'il y ait un livre qui nous explique la guerre, comme celui-ci, et un livre qui nous explique la paix. Comme ce livre parle seulement des conflits, on peut penser que la guerre est partout. Mais il y a de la paix quelque part, même si je pense qu'il y a plus de guerre que de paix.

– En Europe, il y a pourtant la paix.

– Mais il y a aussi des conflits; en Espagne, avec les Basques et l'ETA, ou en Irlande.

– Est-ce que tu as regardé les informations depuis que tu as commencé à lire ce livre?

– Pas à la télé, mais j'ai lu le journal.

– Quel journal?

– J'achète Le Parisien, c'est surtout pour les horoscopes. Et à la maison, on a Le Monde. Dans les journaux, je regarde le sport et je les parcours pour voir s'il y a quelque chose qui me semble intéressant. Je ne regarde pas toujours l'Afghanistan, parce que c'est à peu près tout le temps la même chose. Une ou deux fois par semaine et je sais ce qui se passe.

– Est-ce qu'ils parlent du pétrole?

– Par exemple, au Liberia, les factions se disputent pour les minéraux et pour le pétrole…

– Il y a beaucoup de choses dans ce livre. L'as-tu trouvé facile, ou difficile?

– Au début, il faut rentrer, comme dans tous les livres. On doit placer le décor. Mais quand le décor est placé, c'est mieux et plus simple que de lire le journal avec des trucs que tu ne comprends pas. C'est vrai pour ce qui se passe maintenant. Et aussi pour l'avenir. S'il y a un conflit qui ressurgit, je pourrai reprendre «Mondes rebelles», et ça m'aidera à le comprendre.

– A partir de quel âge penses-tu qu'il est possible de lire «Mondes rebelles junior»?

– A partir de la fin de l'école primaire, 10 ans. Plus petit, je ne crois pas. Pour moi, c'est idéal à partir de 11 ans.

– Est-ce qu'il peut être utile pour les parents? Parce que les parents ne comprennent pas tout.

– S'ils ne comprennent pas, je pense qu'il faudrait plutôt un «Mondes rebelles senior».

– Par chance, il existe. Mais c'est un très gros livre que les parents n'ont pas forcément le temps de lire. Est-ce qu'ils peuvent prendre le tien pour avoir un résumé des événements?

– Je ne trouve pas, parce que, pour les parents, «Mondes rebelles junior» risque d'être un peu bébête.

– Recommanderais-tu ce livre à tes copains de classe?

– S'ils sont intéressés par les problèmes du monde, oui. Mais tous ne sont pas intéressés. C'est bien de le lire parce que les enfants comprennent mieux ce qui se dit à table, entre adultes ou avec les grands frères et les grandes sœurs. Si on a lu ce livre, on pourra entrer dans la conversation.

«Mondes rebelles junior», d'Elisabeth Combres et Florence Thinard, présenté

par Emmanuelle de La Grange, avec la participation de Médecins du Monde, Ed. Michalon, 130 pages.