Pas un jour ou presque sans que nous entendions parler des derniers développements en matière de voitures autonomes. Parfois de manière dramatique, comme ces derniers jours après l’accident qui a coûté la vie à un piéton en Arizona.

Les attentes concernant ces véhicules sont en effet immenses. Au-delà de l’attrait évident de pouvoir se détendre dans une voiture qui conduira toute seule, les véhicules autonomes offrent la perspective de systèmes de transport plus efficaces, plus écologiques, plus inclusifs et plus sûrs. Autant de solutions aux bouchons et à la pollution, et donc de contributions à l’ambitieux programme de développement durable à l’horizon 2030 adopté par la communauté internationale.

Des Etats-Unis à l’Europe et à l’Asie, de nombreux pays lancent des projets visant à tester ces véhicules, car ils ont compris l’avantage concurrentiel vital que ce domaine en évolution rapide représentera pour leur industrie à l’avenir. D’aucuns finissent par en oublier que la transition vers la voiture sans conducteur sera nécessairement graduelle. Et qu’elle passera par Genève.

Lire aussi l’opinion: L’avenir de la voiture autonome se décidera à Genève

L’enjeu de la réglementation

Les interrogations sur les implications éthiques de l’intelligence artificielle qui pilotera les véhicules entièrement autonomes, ce que les spécialistes appellent le niveau 5 de l’automatisation des véhicules, sont tout à fait légitimes et doivent être posées. Notamment pour que l’homme, et non la machine, apporte les réponses appropriées.

Dans un avenir prévisible, les véhicules autonomes devront partager la route avec les voitures traditionnelles et d’autres modes de transport

Mais nous n’en sommes pas encore là. La participation de près de 60 pays et de la majorité des grands constructeurs automobiles aux travaux du Forum mondial pour l’harmonisation des règlements sur les véhicules, qui se réunit périodiquement à Genève sous les auspices de la CEE-ONU, a permis ces dernières années de réglementer les fonctions d’aide à la conduite automatisée au niveau international. Les économies d’échelle ainsi dégagées permettent la diffusion la plus large de ces avancées technologiques.

Les fonctionnalités autorisées pour l’instant sur des véhicules de série se situent aux niveaux 1 et 2 d’automatisation. Par exemple, le conducteur gare sa voiture en la pilotant à distance avec sa clé ou son smartphone; ou bien la voiture conduit sur l’autoroute, voire change de voie automatiquement, tout en respectant les distances de sécurité dans le cadre des limitations de vitesse. Dans tous ces scénarios, le conducteur doit rester maître de son véhicule. Le Forum mondial travaille maintenant sur les niveaux supérieurs d’automatisation.

Ne pas brûler les étapes

Mais l’accident mortel de ces derniers jours en Arizona, impliquant un véhicule en mode autonome en phase de test, mais avec une présence humaine dans l’habitacle, a mis en lumière de manière dramatique les progrès qui restent encore à faire. Et surtout, la nécessité de ne pas brûler les étapes.

En effet, dans un avenir prévisible, les véhicules autonomes devront partager la route avec les voitures traditionnelles et d’autres modes de transport. Ils devront aussi maîtriser la conduite en ville avec tous ses aléas (mouvements imprévus des piétons et des deux-roues, transports en commun de surface, etc.).

Lire également: La voiture autonome débarque, pour le meilleur et pour le pire

De plus, des questions cruciales devront avoir été résolues, notamment la responsabilité en cas d’accident, les régimes d’assurance, la fiabilité des logiciels, la cybersécurité et la protection des données personnelles, pour n’en citer que quelques-unes.

Chantier majeur

Tous ces défis complexes nécessiteront des réponses réfléchies et coordonnées, si l’on veut tirer pleinement parti des bénéfices annoncés de ces avancées technologiques. C’est un chantier majeur, dont les Etats attendent beaucoup. Les ministres des Transports du G7 s’en sont fait l’écho en appelant à un approfondissement des travaux au sein du Forum mondial lors de leurs trois dernières réunions.

Nous avons les moyens de répondre à ces attentes si tous les acteurs concernés – Etats, industrie automobile, industries des télécommunications et des logiciels et autres organisations développant des normes internationales – coopèrent activement au développement des cadres juridiques indispensables, sans céder à la tentation du chacun pour soi.

Le Temps publie des chroniques et des tribunes – ces dernières sont proposées à des personnalités ou sollicitées par elles. Qu’elles soient écrites par des membres de sa rédaction s’exprimant en leur nom propre ou par des personnes extérieures, ces opinions reflètent le point de vue de leurs autrices et auteurs. Elles ne représentent nullement la position du titre.