Le Temps: En quoi la récolte de données propres à chaque patient va-t-elle faire progresser la recherche sur le cancer?
Olivier Michielin: Notre objectif, à terme, est d’aboutir à une ultra-personnalisation des traitements, notamment des immunothérapies. Pour ce faire, nous devons prendre en compte les propriétés du système immunitaire, mais aussi l’ensemble des données concernant le fonctionnement de la tumeur, tel que la génomique, la transcriptomique ou encore la protéomique. Je suis convaincu que les réponses à une grande partie des questions que l’on se pose en oncologie se trouvent dans cette base d’informations complexes.
Nous allons également suivre des patients sur plusieurs années, afin de pouvoir déterminer quelle est la meilleure séquence de traitement possible en fonction du profil des tumeurs rencontrées. Cet aspect bien précis, personne ne l’a encore étudié, mais pour cela, nous avons besoin d’un maximum de données.
– Vous soulignez également l’importance d’harmoniser la façon dont les cas sont décrits entre les hôpitaux…
– C’est exact. Afin de pouvoir mettre en commun nos ressources, il est important que nous parlions le même langage, de standardiser la nomenclature quant à la description, par exemple, des effets secondaires d’un traitement par chimiothérapie. Une fois que nous serons parvenus à unifier nos forces, nous allons assurément nous retrouver face à un tsunami d’informations utiles.
– Par ce projet, les données récoltées pourront être exploitées en tout temps, ce qui est plus difficile lorsqu’elles sont hébergées auprès de différents partenaires.
– En effet. Je suis persuadé que la Suisse peut jouer un rôle de pionnier dans la personnalisation des traitements contre le cancer mais, pour cela, il est important que nous standardisions et centralisions la gestion de ce type d’informations. Toutes les données collectées dans le cadre de ce projet seront analysées avec nos propres outils académiques d’intelligence artificielle. Cet aspect est primordial, car cela nous laissera l’opportunité de réaliser facilement, si nécessaire, un travail rétrospectif sur un gène qui aurait, par exemple, été ignoré dans un premier temps.