La polémique relancée en 1995
Pour ou contre la mammographie, vieux débat
«Partisans et adversaires des mammographies s’affrontent dans l’arène scientifique. Le professeur canadien Charles Wright a relancé la polémique avec un article explosif paru dans le Lancet . Selon lui, le bénéfice des mammographies est marginal alors que les torts causés par l’examen sont importants. Quant aux coûts, les médecins les qualifient d’«énormes». En conséquence, il estime que l’utilisation de fonds publics pour le dépistage du cancer du sein par radiographie n’est pas justifiée. Un pavé dans la mare pour les médecins suisses qui ont mis sur pied un programme pilote de mammographie dans le canton de Vaud. Et s’apprêtent à entreprendre l’expérience à Genève. Mais, pour eux, les propos du Dr Wright tiennent de l’effet de manches. En effet, la majorité des scientifiques s’appuient sur le consensus réunissant les pays européens et nord-américains, en faveur du dépistage des femmes de plus de 50 ans. Car, malgré ses inconvénients, le dépistage est le seul moyen de lutter contre une maladie qui touche 4000 femmes par an en Suisse et cause environ 1700 décès. C’est la principale cause de décès des femmes en âge d’activité professionnelle.
Parler du cancer du sein, des mérites et des inconvénients de la mammographie soulève les passions. Les scientifiques en perdent leur calme et il est difficile pour les femmes de se faire une opinion.
«C’est vrai, admet la doctoresse Christine Bouchardy, du registre des tumeurs à Genève […]. Le sein est un organe chargé de symboles, et pour les médecins, il est difficile d’accepter l’idée qu’ils prescrivent un examen potentiellement néfaste. Il faut tout de même noter que seuls cinq médecins écrivent encore contre la mammographie dans le monde.» Toutefois, Christine Bouchardy est d’avis qu’il faut poser des limites à cet examen. «Le dépistage systématique n’a pas de sens avant 50 ans. Il y a trop d’effets secondaires. […] La mammographie n’est pas la panacée mais c’est notre seul moyen de lutte.» […]
En fait, «il faut dépasser la polémique et informer les femmes des bénéfices mais aussi des limites de cet examen afin qu’elles puissent participer ou non à ce dépistage en toute connaissance de cause, conclut [-elle]. »
««Mon gynécologue m’a demandé de procéder à une mammographie, je ne suis plus retournée le consulter car je n’ose pas faire cet examen. J’ai trop peur qu’il soit positif», confesse une patiente à son médecin généraliste. Et c’est vrai, cette patiente prend des risques en se soumettant à l’examen demandé. Seuls 9 cancers sur 10 seront détectés correctement. Cet examen en manquera donc un. Elle prend également le risque d’être faussement alertée et de subir des examens inutiles. C’est le cas d’environ 2% des femmes. La durée de la maladie sera également plus longue, car le cancer aura été détecté environ trois ans plus tôt.
En revanche, la peur des rayons est injustifiée car le risque d’induction d’un cancer par cette radiographie est négligeable après 50 ans.
L’examen permettra d’éviter environ un décès sur trois chez celles qui se soumettent régulièrement à la mammographie après 50 ans. Enfin, des femmes auront plus de chances de garder leur sein en cas d’atteinte et, dans 97% des cas, elles pourront être rassurées immédiatement et correctement. »
« Je ne suis plus retournée consulter mon gynécologue, car je n’ose pas faire cet examen. J’ai trop peur qu’il soit positif »
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