Durant vingt ans, le duo collabore étroitement et construit une nouvelle vision bouleversant la façon dont la science conçoit le cosmos. Ce serait la «dernière théorie» de Stephen Hawking, disparu en 2018 à l’âge de 76 ans.
Lire aussi: Stephen Hawking, ou la pas si brève histoire du génie qui s’est éteint
Thomas Hertog l’expose pour la première fois en intégralité dans son livre L’origine du temps, paru au printemps 2023 au Royaume-Uni et en France.
Dans un entretien à l’AFP, l’auteur a raconté sa collaboration avec son mentor et ami. Et décrit comment Hawking a finalement estimé que son livre phare Une brève histoire du temps, vendu à plus de 10 millions d’exemplaires, avait été écrit «du mauvais point de vue».
L’univers répond à un «design»
A leur rencontre, Hawking aborde d’emblée la question qui le taraude. «L’univers que nous observons paraît répondre à un design», lui lance-t-il via son boîtier de dialogue qui lui donne une voix de robot. «Les lois de la physique se révèlent parfaites pour que l’univers soit habitable», développe Thomas Hertog.
Cette remarquable chaîne de circonstances favorables s’étend de l’équilibre délicat permettant aux atomes de former les molécules nécessaires à la chimie, jusqu’à l’expansion de l’univers lui-même, qui permet l’apparition de vastes structures comme les galaxies.
«De sa naissance violente, l’univers a émergé dans une configuration spectaculairement adaptée au développement de la vie – même si celui-ci n’aurait lieu que des milliards d’années plus tard», écrit le scientifique.
Une réponse «à la mode» à cette énigme est le multivers, idée récemment devenue populaire au cinéma. Cette théorie tente d’expliquer la nature apparemment façonnée de l’univers, en en faisant un parmi d’innombrables autres, qui seraient eux «sans intérêt, sans vie», selon le cosmologiste de 47 ans.
Mais Hawking s’est rendu compte du «grand bourbier de paradoxes dans lequel le multivers nous entraînait». Le multivers et même Une brève histoire du temps étaient des «tentatives pour décrire la création et l’évolution de notre univers en se plaçant depuis ce que Stephen appellerait une 'perspective divine'», poursuit Thomas Hertog.
Pendant 15 ans, les deux scientifiques font appel à l’étrangeté de la théorie quantique pour proposer une nouvelle théorie, à partir d’un nouveau point de vue.
«J’ai cru que c’était fini»
En 2008, Hawking perd la capacité d’utiliser son boîtier de dialogue, s’isolant davantage. «J’ai cru que c’était fini», témoigne Thomas Hertog. Mais le duo développe une communication non verbale «quelque peu magique», et peut continuer à travailler.
Thomas Hertog se place en face du physicien, et lui pose des questions en le regardant dans les yeux. Hawking «avait une très large gamme d’expressions faciales, allant du désaccord extrême à l’excitation extrême». Le lien est tel qu’il est, selon lui, «impossible de distinguer» les idées émanant de lui ou de Hawking.
Leur théorie se concentre sur ce qui s’est passé dans les premiers instants après le Big Bang. Plutôt qu’une explosion consécutive à un ensemble de règles préexistantes, ils suggèrent que les lois de la physique elles-mêmes ont évolué en même temps que l’univers.
Donc que si l’on remonte suffisamment loin dans le temps, «les lois de la physique commencent à se simplifier et à disparaître», explique Thomas Hertog. «En fin de compte, même la dimension du temps s’évapore.»
Les lois de la physique et le temps auraient évolué de manière semblable à l’évolution biologique - le titre de son ouvrage se réfère à celui de Darwin De l’origine des espèces.
«La biologie et la physique sont deux niveaux d’un grand processus d’évolution.» Il est néanmoins difficile de prouver cette théorie car les premières années de l’univers restent «cachées dans le brouillard du Big Bang».