Aux Etats-Unis le processus n’est toujours pas lancé. Les autres grands pollueurs, notamment la Chine et l’Inde ne montrent aucune précipitation non plus. Les experts craignent que la mise en œuvre de l’accord soit repoussée au-delà de l’échéance fixée à 2020. Un premier état des lieux sera présenté lors de la prochaine réunion de la COP qui aura lieu du 7 au 18 novembre à Marrakech. La France passera alors la présidence au Maroc.
La Hongrie puis la France
A Bruxelles, ce n’est toutefois pas la volonté qui fait défaut. Réunis au Luxembourg le 20 juin dernier, les 28 ministres européens de l’Environnement ont appelé à une ratification rapide par les Etats. «Nous avons voulu donner un signal fort pour lancer les procédures au plus vite, avait alors déclaré la ministre néerlandaise Sharon Dijksa, dont le pays assure la présidence tournante du Conseil européen. Il faut que l’UE puisse faire partie de l’accord lorsqu’il entrera en vigueur.»
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A ce stade, la France, pays hôte de la COP21, s’est fait un point d’honneur pour être la seule parmi les pays du G7 et du G20 à promulguer le traité. Le sénat a donné son feu vert le 8 juin dernier à l’unanimité. Au sein de l’UE, c’est la Hongrie qui l’avait précédée de quelques jours. La ministre française de l’Environnement Ségolène Royal qui avait été l’une des chevilles ouvrières de la conférence de Paris souhaite une ratification européenne pour cet automne. «Les procédures vont s’accélérer car il y a une prise de conscience extrêmement positive qui s’exprime aujourd’hui», s’est-elle félicitée en début du mois. Avec la bénédiction de Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne, elle a écrit aux 28 chefs d’État et de gouvernement leur demandant un calendrier de travail.
Plus réaliste, la ministre Dijksa a déclaré que le retard était compréhensible du fait que dans certains cas, aux Pays-Bas par exemple, le processus de ratification touchait directement la Constitution, ce qui nécessite plus de temps.
La répartition des efforts pas définie
Autant sur la forme que sur le fond, l’UE n’a toujours pas fait de proposition sur le partage de l’effort en matière de lutte contre le réchauffement climatique parmi les Vingt-Huit. Elles sont annoncées pour le mois prochain. A Paris, le commissaire européen à l’Environnement, l’Espagnol Miguel Canete s’était montré très ambitieux et s’était engagé à réduire d’au moins 40% les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, par rapport aux niveaux de 1990. Le débat, qui s’annonce difficile, va occuper les Vingt-Huit durant plusieurs mois. Notamment parce que les Etats membres d’Europe de l’Est veulent obtenir des compensations pour les efforts qu’ils doivent consentir pour atteindre les objectifs européens.
La Pologne est à l’avant-garde de ces revendications. Logiquement, elle devrait réduire graduellement sa dépendance du charbon. A présent, cette matière première représente 95% dans la production de l’électricité consommée dans le pays, soit 85 millions de tonnes chaque année. Dans les zones rurales, des milliers de foyers l’utilisent pour le chauffage.
La Pologne traîne les pieds
Lorsqu’il était le chef de gouvernement polonais, l’actuel président du Conseil européen Donald Tusk affirmait que son pays ne pouvait pas se passer du charbon. Désormais, le nouveau gouvernement conservateur qui a soutenu la signature de l’accord du COP21 a repris la même rhétorique. Jaroslaw Kacynski, l’homme fort du parti Loi et Justice a encore déclaré le mois dernier que Varsovie aurait dû mettre son véto contre les objectifs européens de 2030. Il a fait aussi comprendre que des milliers de travailleurs dans les mines, base électorale de son parti, se retrouveront au chômage si la Pologne abandonnait le charbon.
«La Commission est consciente de la difficulté que pourrait poser la ratification de l’Accord sur le climat, déclare un diplomate européen. Dès lors, elle cherche les moyens pour contourner la Pologne ou tout autre pays récalcitrant à l’exercice.» Selon lui, l’UE ne pourrait se permettre d’être l’otage de l’un ou l’autre pays.
Dans un registre différent, le même diplomate ne voit pas de problème lié au Brexit voté la semaine passée. «Le Royaume-Uni qui a participé activement à fixer l’objectif européen en matière de réduction de l’émission de gaz à effet de serre, restera membre de l’UE ces prochains mois et aura des droits et des obligations, dit-il. Si la ratification a lieu durant cette période, Londres sera appelé à participer au partage de l’effort européen.»