C’est bien connu, il existe des assurances pour tout. Des pieds des joueurs de foot les plus célèbres à la protection financière contre un kidnapping par des extraterrestres, le secteur a toujours fait preuve d’imagination, aidé par des clients tout aussi inventifs. Désormais, une nouvelle forme d’assurance est en train de voir le jour: celle des éléments de la nature elle-même.

Les compagnies d’assurances offrent des protections contre les catastrophes naturelles depuis longtemps, mais jamais des morceaux de terre. Or c’est une première: Swiss Re va assurer une barrière de corail au Mexique. L’annonce est pourtant beaucoup moins anecdotique qu’elle n’y paraît.

Indicateurs du réchauffement climatique

L’accord découle d’une initiative de The Nature Conservancy, une organisation américaine qui travaille pour la protection de l’environnement. Elle estime que des entreprises privées peuvent intervenir et mettre leur pierre à l’édifice de la lutte contre le changement climatique.

Les récifs coralliens de Cancún ne représentent pas seulement le joyau de toute la région qui vit essentiellement du tourisme. Ils forment aussi une protection pour les riverains contre les tempêtes violentes.

Or entre le risque de tempête ou d’inondation de plus en plus sévères et les dégâts liés à l’exploitation humaine et l'acidification des océans, les coraux souffrent. On dit d’eux qui sont les indicateurs les plus précis des conséquences du réchauffement climatique. D’après The Nature Conservancy, chaque mètre de hauteur perdu par la barrière entraîne un triplement des coûts économiques liés aux dégâts des tempêtes sur la côte.

Jusqu’ici, c’est le gouvernement mexicain qui débloquait les fonds en cas de tempêtes pour financer les réparations globales, prélevant ensuite un impôt aux hôtels et entreprises touristiques de la région. Mais ce système est trop lent, ont déploré les acteurs locaux.

Incitation à prendre soin des coraux

Swiss Re propose donc un autre système, avec l'appui du gouvernement mexicain. En échange de primes estimés par le Guardian, qui a publié l’information, entre 1 et 7,5 millions de dollars, payés collectivement par les entreprises et hôtels de la côte, le groupe basé à Zurich protégera 60 kilomètres de la précieuse barrière multicolore, également vitale pour la reproduction de certaines espèces aquatiques.

En cas de tempête dévastatrice, l’assureur débloquera immédiatement entre 25 et 70 millions par année pour permettre de réparer au plus vite.

Dans certains cas, les coraux pourront être remplacés par des substituts artificiels, ils pourront également être retirés provisoirement, le temps de guérir et d’être réintégrés à la barrière. Les acteurs locaux auront une incitation à être soigneux, sans quoi, les primes augmenteront.

Pour The Nature Conservancy et Swiss Re, ce projet constitue surtout un ballon d’essai. Le groupe suisse y voit un nouveau marché alléchant et sous-estimé, tandis que l’ONG espère ainsi soutenir d’autres régions protégées par des barrières de corail ou d’autres sites en danger comme la mangrove.