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Trois nouveaux mondes autour d’une étoile naine

Autour d’une étoile discrète et de faible luminosité vient d’être découvert un système planétaire dont l'atmosphère des astres pourrait être étudiée avec le télescope spatial Hubble. Une nouvelle étape dans la chasse aux exoplanètes

Vue d'artiste de l'étoile TRAPPIST-1. — © ESO/M. Kornmesser
Vue d'artiste de l'étoile TRAPPIST-1. — © ESO/M. Kornmesser

Quoi de plus banal qu’une nouvelle exoplanète? L’annonce de la découverte d’un monde exotique n’a plus rien d’exceptionnel dans les titres de l’actualité scientifique. En une vingtaine d’années, plus de 2 000 planètes ont été détectées en dehors du système solaire, principalement autour d’étoiles qui ressemblent à la nôtre. Alors pourquoi parler de la découverte de trois mondes autour d’une étoile naine, faite récemment par deux astronomes de l’Université de Liège, en Belgique, qui les ont décrits dans la dernière édition de la revue «Nature»? Parce que «c’est le résultat le plus enthousiasmant de ces dix dernières années», d’après Didier Queloz, professeur à l’Université de Cambridge.

L’astrophysicien suisse sait de quoi il parle, lui qui a découvert avec Michel Mayor, en 1995, la toute première planète extrasolaire autour de l’étoile Pégase b. «Jusqu’ici, nous avons cherché des planètes qui ressemblaient à la Terre, autour d’étoiles qui ressemblaient au Soleil. Nous n’y avons pas trouvé de signe de vie. Et pour cause: avec les moyens technologiques actuels, nous sommes incapables de les détecter. La découverte publiée dans «Nature» ouvre les portes d’un nouveau domaine qui va faire avancer la recherche!»

L’astuce des astronomes belges a consisté à rechercher des nouveaux mondes non plus autour d’étoiles semblables au Soleil, mais autour d’une autre catégorie d’astres: les naines ultrafroides. Et ça a marché! A l’aide du télescope TRAPPIST, un instrument de 60 cm de diamètre situé à La Silla, au Chili, ils ont observé une soixantaine d’étoiles de cette catégorie, toutes situées à moins de 60 années-lumière de notre système solaire. Autour de l’une d’entre elles, désormais nommée TRAPPIST-1, ils ont trouvé non pas une, mais trois planètes en orbite, qui auraient la taille de la Terre.

Potentiel inexploré

«Ces étoiles sont très nombreuses dans notre galaxie, explique Michaël Gillon, l’un des deux principaux auteurs de l’étude. Elles sont petites et peu lumineuses, donc difficiles à observer dans le visible. L’étoile TRAPPIST-1 a ainsi été observée pour la première fois en 2000. Elle fait la taille de Jupiter, et est bien plus légère et deux fois plus froide que le Soleil.»

L’avantage de ces petites étoiles est qu’elles n’aveuglent pas les télescopes qui tentent d’obtenir des informations sur les planètes en orbite autour d’elles. «À l’heure actuelle, 30 planètes potentiellement habitables ont été détectées, poursuit Michaël Gillon. Mais on ne peut pas les étudier en profondeur en raison de la force du signal envoyé par leur étoile. Les naines ultrafroides ont un potentiel inexploré, d’autant qu’elles représentent 20% des étoiles dans la galaxie. Or si un système planétaire a été découvert autour d’une étoile sur 60, cela signifie soit que c’est un coup de chance, soit que c’est quelque chose de commun.»

D’après les données obtenues en observant la baisse de luminosité de l’étoile provoquée à intervalles réguliers par le passage d’un corps devant elle, les trois planètes ne seraient pas plus grandes que la Terre, et situées sur des orbites très proches de leur étoile. La plus proche met 1,5 jour pour en faire le tour, la deuxième, 2,4 jours, et la troisième – les résultats doivent encore être affinés – entre 4,5 et 73 jours. Étant donné cette proximité, il est probable qu’elles présentent toujours le même côté à l’étoile, comme la Lune présente toujours la même face à la Terre. «C’est un système planétaire qui ressemble plus à Jupiter et ses satellites qu’à notre système solaire», indique Michaël Gillon.

Zone habitable

Cette configuration pourrait induire qu’elles sont situées dans la zone habitable de l’étoile, c’est-à-dire la région où pourrait se développer la vie, notamment grâce à la présence d’eau liquide. Mais pour l’instant, aucun modèle n’existe quant à l’évolution de ces objets. Il est possible que l’hémisphère exposé à l’étoile soit tellement chaud que l’eau n’y existe qu’à l’état de vapeur, tandis qu’elle se condense sous forme de glace sur la face cachée. L’eau pourrait être liquide à la limite entre le jour et la nuit.

«Cette découverte pose de nombreuses questions dont personne n’a les réponses, souligne Dider Queloz. Quelle est la nature de ces planètes? Quels sont les effets de la gravitation à leur surface? Quelle est la quantité d’eau qu’elles contiennent? Nous allons les observer intensément à l’aide d’autres techniques afin de mieux les connaître.»

Dès mercredi, le télescope spatial Hubble va se tourner dans leur direction pour faire des études préliminaires. Toujours en utilisant la méthode du transit (le passage de la planète devant l’étoile), les astronomes regarderont les molécules qui sont contenues dans leur atmosphère. En 2018, l’arrivée du télescope spatial James Webb promet d’ouvrir un œil puissant sur ces nouveaux mondes.

En attendant, au Chili, on continue de chercher de nouvelles planètes autour de naines ultrafroides afin d’enrichir le catalogue. Plus de 500 étoiles vont être observées par des télescopes d’un mètre, dans le cadre d’un projet baptisé SPECULOOS (Search for habitable Planets EClipsing ULtra-cOOl Stars). On est belge ou on ne l’est pas.

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