Découverte en 1927 déjà, la fluorescence des coraux a ensuite vu son mécanisme détaillé surtout entre 1940 et 1970: des protéines lovées dans la surface de ces animaux (nommées Green Fluorescent Protein, GFP), lorsqu’elles sont baignées de lumière, en absorbent les rayons UV invisibles à l’œil nu, et réémettent une lumière perceptible cette fois, car dans une autre longueur d’onde, autrement dit une autre couleur, rouge, verte, orange, violette. Ceci en dissipant au passage un peu de chaleur.
Si l’explication du phénomène est connue, sa raison d’être ne l’est pas. «D’aucuns avancent que la fluorescence est une parade des coraux pour protéger d’une lumière solaire trop intense les algues symbiotiques qu’ils hébergent, surtout lorsqu’ils sont près de la surface de l’eau», explique le biologiste Martin Colognoli, cofondateur de l’ONG Coral Guardian.
Or en 2015, une étude publiée dans PLoS ONE a rapporté pour la première fois l’existence de coraux fluorescents par 50 m de profondeur dans la mer Rouge. «Là, il se peut bien que la fluorescence ait l’effet inverse, et aide les coraux à accroître leur environnement lumineux» pour favoriser la photosynthèse faite par ces mêmes algues, appelées zooxanthelles, indique dans Nature l’auteur de cette découverte, Jörg Wiedenmann, à l’Université de Southampton. D’autres scientifiques estiment que la fluorescence serait exploitée comme moyen de défense par le corail pour modifier son aspect visuel afin de détourner ses prédateurs (les poissons papillons par exemple).
Sensibiliser la population
Plus récemment a été émise l’hypothèse que cette fluorescence pourrait servir d’indicateur de la santé des coraux. Que cette idée se vérifie ou non, l’ambition de cette exposition est aussi là: « Sensibiliser les gens à la fragilité des coraux, et des océans, dans un monde soumis au réchauffement climatique», dit Martin Colognoli. C’est d’ailleurs lui, avec son collègue Guillaume Holzer, qui est l’auteur de ces magnifiques clichés, pris non loin de leurs bases indonésiennes de Bali ou de Flores, où leur ONG poursuit des programmes de sauvegarde en proposant notamment des stages d’écovolontariat.
Une fois leurs activités diurnes achevées, les deux amis enfilent leur combinaison de plongée. Eclairant les coraux avec une lampe UV particulière, ils photographient ces organismes marins dans leurs apparats fluo, avec là aussi un appareil équipé d’un filtre idoine. Et c’est là aussi qu’ils sont parvenus, entre les coraux, à imager la fluorescence de plusieurs autres animaux, dont un hippocampe. Et un poulpe: «C'est là une image très rare!» souligne Martin Colognoli.
* Aquarium de Paris, jusqu’au 30 septembre 2017