Qu’en est-il des hospitalisations liées au Covid-19 chez les enfants?
Coronavirus
Plusieurs observations suggèrent que le variant Delta ne serait pas plus virulent que la souche précédente, mais que sa plus grande transmissibilité provoque statistiquement plus de contaminations et de facto d’hospitalisations parmi les populations non vaccinées, notamment chez les enfants

Le Covid-19 peut aussi entraîner des complications graves chez les enfants et les adolescents, bien qu'elles soient rares, certaines nécessitant une prise en charge hospitalière. En Suisse, selon les données recueillies par l’Unité suisse de surveillance pédiatrique (SPSU) en provenance de 29 cliniques spécialisées en pédiatrie, ce sont 2606 enfants qui ont été hospitalisés en lien avec une infection au SARS-CoV-2 depuis le début de la pandémie, ou chez qui l’on a dépisté une infection alors qu’ils étaient à l’hôpital.
Lire aussi: Pourquoi les enfants sont-ils moins touchés par les formes graves du Covid-19?
Le variant Delta, bien plus transmissible, a-t-il provoqué une hausse du nombre d'hospitalisations chez les enfants? Quelles sont les raisons qui nécessitent une prise en charge à l’hôpital au sein de la population pédiatrique? Sollicités par Le Temps, plusieurs hôpitaux ont accepté de nous donner des précisions afin de mieux appréhender cette problématique.
Des hospitalisations stables
Premier constat: malgré la forte hausse des cas d’infections observée ces dernières semaines en Suisse chez les 0 à 9 ans et les 10 à 19 ans (cette dernière catégorie étant même la plus touchée depuis la semaine du 23 août), les nouvelles hospitalisations dans ces tranches d’âge restent, pour le moment, relativement stables.
L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) recense une dizaine de nouvelles hospitalisations par semaine chez les 0 à 9 ans, des chiffres similaires à ceux observés entre la fin de l’année 2020 et le printemps 2021. Les hospitalisations chez les 10 à 19 ans suivent, quant à elles, la même tendance, mais à des niveaux légèrement inférieurs.
Lire également: En Suisse, le nombre de cas de covid explose chez les moins de 10 ans
Effet statistique
«Nous n’avons pas, jusqu’à présent, observé d’augmentation du taux d’hospitalisation chez les enfants avec l’apparition du variant Delta. Mais les chiffres ont toujours un peu de retard et comme l’école a repris il y a un mois seulement, il est difficile de se prononcer, analyse Petra Zimmermann, médecin adjointe en infectiologie pédiatrique à l’Hôpital fribourgeois et co-investigatrice d’une étude en cours sur le covid et les cas de syndrome inflammatoire multisystémique pédiatrique (PIMS-TS) chez des enfants en Suisse. Au niveau international, ainsi que dans notre étude, rien ne prouve que ce variant entraînerait une augmentation du nombre de cas de PIMS-TS.»
Dans le sud des Etats-Unis, où la population adulte est peu vaccinée et où le port du masque n’est pas imposé dans certaines régions, y compris dans les espaces intérieurs, le nombre d’enfants hospitalisés avec un Covid-19 a presque quintuplé depuis l’apparition du variant Delta. Selon les données disponibles, la proportion d’enfants et d’adolescents hospitalisés en raison de complications graves semble toutefois identique avant et pendant la période de domination du variant Delta.
Une situation similaire se retrouve en Nouvelle-Galles du Sud (Australie), où une recherche conduite par le National Centre for Immunisation Research and Surveillance (NCIRS) a montré que si les transmissions au sein des écoles et des garderies s’y produisaient à un rythme cinq fois supérieur à 2020, la proportion d’enfants d’hospitalisés se maintenait, quant à elle, autour de 2%, dont 0,2% ayant besoin d’une prise en charge aux soins intensifs.
Sur le même thème: Variant Delta à l’école: quels risques pour les enfants?
Ces observations laissent à penser que le variant Delta ne serait pas plus virulent mais que sa plus grande transmissibilité provoque plus de contaminations parmi les populations non vaccinées (à la mi-septembre aux Etats-Unis, près de 26% des nouveaux diagnostics concernaient des enfants) et donc statistiquement plus d’hospitalisations.
Bébés et adolescents
Qu’en est-il des raisons pouvant conduire à des hospitalisations? Selon les données suisses, mais aussi internationales, il semble que le risque d’être hospitalisé soit sensiblement plus élevé chez les enfants de moins de 1 an et les adolescents.
Les raisons les plus souvent invoquées sont un état fébrile prolongé nécessitant une surveillance (en particulier chez les nourrissons), un état général réduit, des symptômes respiratoires pouvant nécessiter un apport en oxygène et des symptômes gastro-intestinaux (mal au ventre, diarrhées, vomissements). «Deux de nos patients ont aussi dû être pris en charge pour des atteintes neurologiques très sévères», pointe Laurence Racine, médecin-cheffe du département de pédiatrie du Réseau hospitalier neuchâtelois.
Lire aussi: Quelles mesures pour diminuer la propagation des aérosols dans les écoles?
Le syndrome inflammatoire multisystémique pédiatrique (PIMS-TS), qui survient entre deux à six semaines après qu’un enfant a été infecté par le SARS-CoV-2, semble toucher particulièrement les enfants âgés entre 8 et 12 ans. Selon les estimations, une centaine d’enfants auraient été touchés par cette affection depuis le début de la pandémie, selon les données recueillies par l’étude conduite par l’Unité suisse de surveillance pédiatrique.
«Ce syndrome se manifeste avec de la fièvre et des valeurs hautes d’inflammation dans le sang, décrit Petra Zimmermann. Très souvent, les enfants touchés présentent des symptômes gastro-intestinaux ou des changements au niveau de la peau, comme des éruptions cutanées, la langue ou les lèvres rouges ou encore des gonflements des mains et des pieds. Des complications d’ordre cardiaque ou neurologique peuvent également apparaître.» Des soins intensifs sont fréquemment nécessaires, mais amènent généralement une résolution complète, malgré la gravité de cette condition.
Lire également: Covid-19: les myocardites pédiatriques ont leur propre signature moléculaire
«Les autres patients sont essentiellement des enfants dépistés lors de leurs hospitalisations pour d’autres motifs, comme une chirurgie, et qui n’ont pas nécessairement des symptômes d’infection, précise le service de pédiatrie du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). Certaines hospitalisations concernent aussi des enfants avec des facteurs de risque, comme une immunosuppression, et quelques nouveau-nés.»