Covid-19: les vaccins auraient évité près de 20 millions de morts en 2021
Pandémie
Conduite par une équipe de l’Imperial College de Londres, une étude visant à quantifier l’impact des vaccins à l’échelle mondiale estime que la vaccination a permis de réduire de 63% le nombre de décès qui auraient pu survenir sans son introduction

La vaccination contre le Covid-19 a permis d’éviter 19,8 millions de morts sur un potentiel de 31,4 millions au cours de l’année suivant l’introduction des vaccins (entre décembre 2020 et décembre 2021), annonce une étude de modélisation, publiée ce 23 juin dans The Lancet Infectious Diseases. Il s’agit du premier travail à évaluer les décès évités directement et indirectement grâce à la vaccination à l’échelle mondiale.
Pour parvenir à ce résultat, les auteurs se sont basés sur les données provenant de 185 pays et territoires, en utilisant les registres des décès excédentaires de chaque pays (ce qui correspond à l’écart entre le nombre de personnes décédées – quelle que soit la cause de la mort – et le nombre de décès attendus selon les statistiques des années précédentes), ou des estimations lorsque les données officielles n’étaient pas disponibles. Ces analyses ont été comparées à un scénario hypothétique alternatif dans lequel aucun vaccin n’aurait été administré.
Le modèle a par ailleurs tenu compte de la variation des taux de vaccination d’un pays à l’autre, ainsi que des différences dans l’efficacité des vaccins dans chaque pays en fonction des types de vaccins connus pour avoir été principalement utilisés dans ces régions. A noter que la Chine n’a pas été incluse dans l’analyse, en raison de sa grande population et de ses mesures de confinement très strictes, qui auraient faussé les résultats.
Un décès sur cinq aurait pu être évité avec un meilleur accès au vaccin
Conclusions: les vaccins contre le Covid-19 ont réduit de plus de moitié le nombre potentiel de décès dans le monde dans l’année qui ont suivi leur introduction. Les pays à revenu élevé et intermédiaires ont enregistré le plus grand nombre de décès évités (12,2 millions sur 19,8 millions), ce qui reflète le déploiement plus précoce et plus large des campagnes de vaccination dans ces régions, et met aussi en évidence les inégalités d’accès aux vaccins dans le monde. Près de 7,5 millions de décès ont été évités dans les pays couverts par l’initiative d’accès aux vaccins contre le Covid-19 (Covax).
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Les scientifiques estiment en outre que près de 600 000 décès auraient pu être évités, si l’objectif de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) de parvenir à une couverture vaccinale de 40% de la population dans chaque pays d’ici à la fin de 2021 avait été atteint.
«Nos résultats montrent que des millions de vies ont probablement été sauvées en mettant les vaccins à la disposition de tous, quelle que soit leur richesse, a déclaré Oliver Watson, chercheur à l’Imperial College de Londres et principal auteur de l’étude, dans un communiqué publié par la revue scientifique. Nous aurions cependant pu faire davantage. Si les objectifs fixés par l’OMS avaient été atteints, nous estimons qu’environ un décès sur cinq liés au Covid-19 aurait pu être évité dans les pays à faibles revenus.»
Plus de trois quarts (soit 15,5 millions sur 19,8 millions) des décès évités étaient dus à la protection directe apportée par la vaccination contre les symptômes graves, entraînant, de facto, une baisse des taux de mortalité. Les 4,3 millions de morts évitées restantes l’ont été, selon les auteurs, grâce une protection indirecte due à la réduction de la transmission du virus dans la population et à la diminution de la charge pesant sur les systèmes de santé, ce qui a amélioré l’accès aux soins médicaux pour les personnes y ayant le plus besoin.
Travailler sur la désinformation
Les auteurs pointent un certain nombre de limitations. Face aux disparités mondiales en matière de surveillance génomique du SARS-CoV-2 et compte tenu de l’absence de données détaillées sur la vaccination dans la majorité des pays, ceux-ci ont dû faire reposer leur modèle sur un certain nombre d’hypothèses de travail. Notamment autour des vaccins administrés, de la manière dont ils l’ont été ainsi que le moment où les nouveaux variants préoccupants se sont répandus dans le monde. Les chercheurs ont également supposé que la relation entre l’âge et la proportion de décès dus au Covid-19 survenant chez les personnes infectées était la même pour chaque pays étudié. Plus généralement, les résultats de l’étude doivent être considérés dans un contexte d’incertitude entourant le calcul véritable du bilan de la pandémie, en raison de la différence de déclaration de la mortalité due au Covid-19 à l’échelle des pays.
Les estimations d’impact dépendaient également du degré supposé d’échappement immunitaire de chaque variant. «Si l’échappement immunitaire était plus élevé que ce que nous avons supposé, une plus grande partie de la population aurait été susceptible d’être réinfectée et, par conséquent, un plus grand nombre de décès dus au Covid-19 auraient pu être évités par la vaccination», écrivent les auteurs dans leur étude. Avant d’ajouter: «Les résultats de cette analyse fournissent néanmoins une évaluation complète et approfondie de l’impact de la vaccination contre le Covid-19, révélant l’impact substantiel des vaccins et les millions de vies qui ont probablement été sauvées au cours de la première année de vaccination.»
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«Il est important que nous veillions à ce que les personnes les plus vulnérables dans toutes les régions du monde soient protégées de la circulation continue du Covid-19 et des autres grandes maladies qui continuent de toucher de manière disproportionnée les plus pauvres, conclut la professeure Azra Ghani, titulaire de la chaire d’épidémiologie des maladies infectieuses à l’Imperial College et coauteure de l’étude. Il est essentiel de garantir un accès équitable aux vaccins, mais il ne suffit pas de faire des dons de vaccins. Il faut améliorer leur distribution et l’infrastructure, tout comme des efforts coordonnés sont indispensables pour lutter contre la désinformation sur les vaccins et augmenter leur demande. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons garantir que chacun ait la possibilité de bénéficier de ces technologies qui sauvent des vies.»